Le recouvrement des charges : quelles sont les pièces nécessaires

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Le Tribunal de Grande Instance de Paris – réunissant tous les Tribunaux d’Instance de chaque arrondissement – fraîchement déménagé dans ses nouveaux locaux, détaille dans un communiqué l’ensemble des documents devant venir à l’appui d’une demande en recouvrement de charges de copropriété :

  • La matrice cadastrale qui justifie de la qualité de propriétaire du débiteur ;
  • Les relevés de comptes de charges générales et particulières habituellement appelés « bordereau d’appel de fonds »  ;
  • Les procès-verbaux d’assemblées générales ;
  • L’attestation de non-recours du Syndic ;
  • Un décompte faisant apparaitre séparément charges et travaux appelés, les frais et les versements effectués depuis l’origine de la dette ;

 

Toutefois, la jurisprudence de la Cour de cassation vient régulièrement nuancer l’importance des appels de fonds dans la justification de la créance, considérant que les procès-verbaux d’assemblée générale sont suffisants pour justifier de l’exigibilité de la créance.

Comment présenter un décompte indiquant les créances depuis l’origine de la dette ?

Le décompte exigé par le Tribunal de Grande Instance ainsi que par la jurisprudence de la Cour de Cassation doit détailler l’ensemble des charges appelées et qui participent à la constitution de la créance afin de la justifier.

En conséquence, ce décompte ne doit pas inclure de reprise de solde antérieur qui apparaitrait en une ligne synthétique mais doit les détailler et présenter l’ensemble des charges qui ont été appelées.

Un arrêt en date du 14 juin 2018 de la Cour de cassation (n° 17-14.766) casse un arrêt de la Cour d’appel jugeant justifié la créance du syndicat des copropriétaires malgré un décompte incluant un « report à nouveau ».

La reprise d’un solde antérieur se caractérise par l’intégration, dans le décompte, d’un report du solde débiteur lorsque les comptes ont été arrêtés, notamment après un changement de Syndic.

Il est possible d’obtenir le détail de l’ensemble de ces charges en demandant le Grand Livre comptable de la copropriété.

Toutefois, afin de ne pas remonter trop loin dans le temps, il est également permis d’imputer les règlements volontaires sur les dettes les plus anciennes et par conséquent apurer cette reprise de solde.

En effet l’article 1253 du code civil dispose que : « Le débiteur de plusieurs dettes a le droit de déclarer, lorsqu’il paye, quelle dette il entend acquitter », mais s’il ne le fait pas, la jurisprudence de Cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 2 décembre 2009, présume que les versements volontaires s’imputent sur les dettes les plus anciennes.

 

Qu’est ce que le bordereau d’appel de fonds ?

L’article 14-1 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que « pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d’administration des parties communes et équipements communs de l’immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel ». Il ajoute que « les copropriétaires versent au syndicat des provisions égales au quart du budget voté » et que « la provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l’assemblée générale ».

Les appels de fonds sont donc les documents qui permettent aux co-propriétaires de connaitre le montant de leurs participations aux dépenses courantes de la copropriété. La question est de savoir si seule la réception les appels de fonds permet de rendre la créance exigible.

 

La dette doit-elle être justifiée par la production au Tribunal de l’ensemble des appels de fonds justifiant la créance ?

L’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 8 mars 2018 (n° 17-15.959) rappelle que l’exigibilité d’une créance en matière de charges de copropriété ne dépend pas de la communication des appels de fonds mais de la date d’exigibilité indiquée dans les procès-verbaux d’assemblées générales qui ont approuvé les comptes du syndicat des copropriétaires.

En conséquence, la Cour de cassation juge que les appels de fonds ne sont pas nécessaires, la créance étant exigible au 1er jour de chaque trimestre puisque cela a été voté au cours de l’assemblée générale.

Cette jurisprudence est-elle appliquée par les juges de première instance ? 

Les Tribunaux d’Instance font une application variable de cette jurisprudence, il est donc prudent de fournir l’ensemble des appels de fond justifiant la créance.

De même, le Tribunal de Grande Instance de Paris, dans son communiqué, indique que les appels de fonds doivent être produits pour justifier du principe et du montant de la créance.

Par conséquent, les juges du fond n’appliquent pas, ou peu, cette jurisprudence de mars 2018. Il est donc opportun de se procurer l’ensemble des appels de fonds afin de justifier la créance et de prouver son exigibilité.

Comment obtenir les appels de fonds ? 

Les appels de fonds s’obtiennent auprès du Syndic de copropriété et figure également sur l’extranet du compte du copropriétaire. Des difficultés peuvent intervenir quand il s’agit de les demander auprès d’un ancien Syndic.

Dans ce cas, l’article 18-2 de la Loi du 10 juillet 1965 impose à l’ancien Syndic de communiquer, entre autres, l’ensemble des documents et archives du syndicat et permet au nouveau Syndic ou au Président du Conseil syndical de le mettre en demeure de communiquer ces documents.

L’article 18-2 ajoute que « après mise en demeure restée infructueuse, le syndic nouvellement désigné ou le président du conseil syndical pourra demander au président du tribunal de grande instance, statuant comme en matière de référé, d’ordonner sous astreinte la remise des pièces et des fonds mentionnés aux deux premiers alinéas ainsi que le versement des intérêts dus à compter de la mise en demeure, sans préjudice de tous dommages et intérêts ».

 

Il est préférable de communiquer les pièces exigées par le Tribunal de Grande Instance de Paris, y compris les appels de fonds. Pour les obtenir, il s’agit de se rapprocher du Syndic ou de l’ancien Syndic et à défaut de mettre en demeure ce dernier afin de les obtenir.

Toutefois, en cas d’impossibilité juridique ou matérielle (perte, destruction ou absence de communication), il sera nécessaire de plaider fermement en rappelant la jurisprudence de la Cour de cassation qui ne juge pas les appels de fonds comme des documents nécessaires pour justifier la créance dès lors que les autres pièces sont produites et notamment les procès-verbaux d’Assemblée Générale.

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