La copropriété en difficulté : comment réagir ?

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L’effondrement tragique des trois immeubles situés à Marseille remet sur le devant de la scène la problématique des copropriétés en difficulté.

Le hashtag #Balancetontaudis remporte un certain succès avec des images inquiétantes.

Environ 15 % des immeubles en France sont touchés par des difficultés plus ou moins importantes.

Pour remédier à cette situation, le Ministre du logement Julien DENORMANDIE a annoncé que « 128 grands ensembles comprenant 23 330 logements particulièrement dégradés seront soutenus en priorité ».

Le plan initiative copropriété consacre trois milliard d’euros entre 2019 et 2029 pour lutter contre les copropriété dégradées.

La problématique est complexe car les causes des dégradations sont nombreuses, de différentes natures et souvent croisées.

Depuis 1994 jusqu’à la loi ELAN, le législateur ne cesse de mettre à la disposition des professionnels et des copropriétaires des mesures de différents niveaux pour résoudre la problématique de la copropriété en difficulté.

En présence de fort taux d’impayés ou de graves difficultés pour assurer la conservation de l’ensemble, le législateur a établi différentes procédures pour redresser la situation en fonction de l’ampleur des difficultés :

  • La première procédure, « le mandat ad-hoc » se présente en cas de difficultés financières grâce à un audit externe et l’intervention de ce médiateur qui propose à la copropriété le vote de mesures préventives permettant un retour à l’équilibre des comptes ;
  • La deuxième procédure, « l’administrateur provisoire » s’active en cas d’impossibilité de pourvoir à la conservation de l’immeuble. Cette procédure exceptionnelle vise un retour au fonctionnement normal de la copropriété par le transfert des pouvoirs du syndic et de l’assemblée générale à cet administrateur ;
  • La troisième procédure, « le plan de sauvegarde », plus politique, peut être décidée en cas de graves difficultés sociales, techniques ou financières, et peut permettre de bénéficier de subventions importantes grâce à un commission composée de plusieurs représentant de l’Etat ;
  • La dernière et ultime procédure, nommée « état de carence », sera mise en place suite à des difficultés irrémédiables et peut conduire à l’expropriation des copropriétaires. 

Le Cabinet BJA, assiste les copropriétés en difficultés et vous permet d’identifier quelle est la procédure à privilégier en fonction de votre situation et à la mettre en œuvre.

Dans cet article, nous nous intéressons uniquement à la procédure de mandat ad-hoc à prendre pour une copropriété en « pré-difficultés ».

D’autres articles suivront concernant les autres procédures.

Qu’est-ce que la procédure de mandat ad hoc ?

A titre préventif, il convient d’abord pour le syndic de procéder avec régularité et diligence au recouvrement des charges votées au titre du budget prévisionnel et du fonds travaux. A, ce titre, il convient de procéder avec la méthode indiquée ici

La loi du 25 janvier 2009 a prévu une procédure « d’alerte préventive » conduisant à la désignation d’un observateur nommé en justice.

Lorsque la copropriété rencontre des difficultés financières, un mandataire ad hoc devra impérativement être désigné.

Il devra dresser un état des lieux et trouver des solutions visant à rétablir l’équilibre financier.

Ces solutions seront indiquées dans un rapport qui devra ensuite être présenté au vote de l’assemblée générale.

Il s’agit de désigner un observateur externe à la copropriété qui procède à son audit avant que n’apparaissent des symptômes manifestant d’une dégradation avancée.

En application du principe de précaution, ce dispositif vise à prévenir plutôt qu’à guérir. L’idée étant qu’une observation attentive doit permettre d’éviter que le syndicat bascule dans la difficulté ou la carence.

La détection des copropriétés en « pré-difficulté » est facilitée avec l’immatriculation de toutes les copropriétés qui doit intervenir d’ici la fin de l’année 2018.

En effet, lors de l’immatriculation les données financières de la copropriété sont indiquées par le syndic qui a aussi l’obligation d’actualiser ces données chaque année.

Cela devrait faciliter le travail des lanceurs d’alerte.

Dans quels cas l’alerte doit être lancée ?

Aux termes de l’article 29-1A seules les difficultés financières donnent accès aux mesures préventives face à une « pré-difficulté ».

En effet, le législateur permet le recours à un mandataire ad hoc si le syndicat rencontre des difficultés financières, sans que ces dernières soient insurmontables ni qu’elles ne traduisent déjà une dégradation matérielle de l’immeuble.

Dans ces derniers cas, il faudra privilégier d’autres procédures de copropriété en difficultés à l’instar de l’administration provisoire.

Le déséquilibre financier est caractérisé dans deux cas de figures :

  • lorsque les impayés atteignent 25 % des sommes exigibles pour les copropriétés de moins de deux cents lots ; ou
  • lorsque les impayés atteignent 15 % pour les copropriétés de plus de deux cent lots.

La situation s’apprécie à la clôture de l’exercice c’est-à-dire à la date de l’arrêt des écritures comptables concernant l’exercice clos.

Toutefois, l’article 61-2 du décret de 1967 apporte une exclusion importante dans le calcul du seuil :

« Ne sont pas considérées comme impayées les sommes devenues exigibles dans le mois précédant la date de clôture de l’exercice »

En effet, il s’agit d’éviter d’initier une telle procédure alors qu’il s’agit peut-être que d’un impayé provisoire.

Qui doit lancer l’alerte ?

Suite à la caractérisation du déséquilibre financier, quatre organes sont habilités à saisir le juge afin de mettre en chair un mandataire ad hoc : le syndic, les copropriétaires, les créanciers, les pouvoirs publics (maire de la commune, préfet, procureur).

  • En premier lieu, le syndic, tenant la comptabilité du syndicat est chargé de cette obligation.

Avant de saisir le juge, le syndic doit informer chacun des membres du conseil syndical.

Il s’agit d’éviter d’initier cette procédure alors que des versements tardifs pourraient encore intervenir grâce à la médiation du conseil syndical auprès des copropriétaires débiteurs.

Ensuite, le syndic a l’obligation de saisir le juge à défaut sa responsabilité pourrait être engagée.

A défaut, de saisine du juge dans le délai d’un mois les autres lanceurs d’alertes peuvent saisir le juge.

Dès lors pourront agir :

  • le ou les copropriétaires représentant au moins 15 % des voix du syndicat ;
  • les créanciers dont les prestations sont essentielles au fonctionnement du syndicat

« Un créancier lorsque les factures d’abonnement et de fourniture d’eau ou d’énergie ou les factures de travaux, votés par l’assemblée générale et exécutés, restent impayées depuis six mois et si le créancier a adressé au syndic un commandement de payer resté infructueux » (article 29-1 A 2°)

  • les pouvoirs publics

Il s’agit plus précisément du maire de la commune du lieu de situation de l’immeuble, du représentant de l’état dans le département, du procureur de la République mais encore du Président de l’établissement public compétent en matière d’habitat.

Le Tribunal de Grande Instance une fois saisi désigne dans une ordonnance le mandataire ad hoc qui peut être un administrateur judiciaire (qui n’est pas l’administrateur provisoire qui dessaisit le syndic de ses fonctions)  ou un professionnel justifiant une expérience de trois ans dans la copropriété.

Le Cabinet BJA se tient à votre disposition pour procéder à la saisine du Tribunal dans les formes requises.

Quelles sont les missions du mandataire ?

La mission du mandataire ad hoc est déterminée par le juge.

Le mandataire ad hoc aura pour mission primaire d’analyser la situation financière de l’immeuble et du syndicat.

Le mandataire fera également l’analyse de l’ensembles des comptes notamment les impayés, les dettes et créances non recouvrés. Il fera également le point sur les contentieux en cours et les contrats souscrits.

Il émettra par la suite des préconisations pour revenir à un état d’équilibre financier du syndicat des copropriétaires.

A titre subsidiaire, le mandataire ad hoc peut également procéder à des médiations, ou des négociations entre syndicat des copropriétaires représenté par le syndic et par exemple les copropriétaires ne payant pas les charges indues, essentielles à la balance financière.

La médiation permettra de résoudre aussi un différend entre certains copropriétaires ou entre le syndicat et un créancier.

La médiation peut également avoir lieu entre le syndicat et une autorité publique à propos de la cession d’ouvrages ou de voierie d’une partie commune de la copropriété.

Le syndic de l’immeuble est-il dessaisi ?

Contrairement à la procédure d’administration provisoire, le mandataire ad hoc travaille en collaboration avec le syndic. Cette collaboration est issue de la volonté du législateur et s’illustre également par le fait que le syndic n’est pas dépossédé de ses fonctions.

Aux termes de l’article 29-1 B alinéa 5, le syndic est chargé de transmettre tous les documents nécessaires aux missions du mandataire désigné. Il peut également aider à l’obtention auprès de l’autorité publique compétente des pièces relatives aux procédures de police engagées à l’encontre du syndicat.

Que contient le rapport du mandataire ?

En politique, on dit que face à un problème on rédige un rapport qui est ensuite mis dans un tiroir.

La copropriété connaît-elle aussi cette politique du rapport ?

En application de l’article 29-1 B de la loi du 10 juillet 1965 : le mandataire ad hoc adresse au juge un rapport présentant l’analyse de la situation financière du syndicat des copropriétaires et de l’état de l’immeuble, les préconisations faites pour rétablir l’équilibre financier du syndicat et, le cas échéant, assurer la sécurité de l’immeuble, ainsi que le résultat des actions de médiation ou de négociation qu’il aura éventuellement menée avec les parties en cause.

Le décret précise que ces préconisations sont priorisées et inscrites dans un calendrier de mise en œuvre (article 61-12-I).

Le rapport peut également préconiser la mise en place d’une assistance provisoire. Cette dernière aidera le syndic à obtenir des aides financières, des crédits ou des subventions.

A titre général, toutes aides permettant à la copropriétaire de revenir à l’état d’équilibre seront proposées.

Lorsqu’il ce médiateur constate des difficultés financières ou de gestion trop importante, il saisit le juge aux fins de désignation d’un administrateur provisoire.

Comment le rapport est-il appliqué ?

Le rapport ne pourra être mis immédiatement dans un tiroir.

En effet, il est prévu qu’un délai de trois mois, renouvelable une fois, le mandataire transmettra son rapport au juge.

Ce document sera, ensuite, porté à la connaissance du syndic, au conseil syndical, au maire, au président de l’EPCI et au représentant de l’État dans le département.

Ces projets de résolution nécessaires à la mise en place des mesures préventives doivent être inscrits par le syndic à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale.

A ce titre, il appartient au syndic, de faire établir les études, devis, offres de financement, les dossiers contentieux ou sociaux et préparer les projets de résolutions.

En présence de mesures d’urgence, l’assemblée des copropriétaires doit être convoquée dans un délai de trois mois après la transmission du rapport. Ce délai est étendu à six mois en l’absence de mesures préventives d’urgence.

En cas de refus de voter les dispositions prévues au rapport par l’assemblée générale et de manifestation de difficultés persistantes, l’administration provisoire pourrait être initiée.

Ce sera le thème de l’article qui paraîtra dans deux semaines.

Recommandations du cabinet BJA :

Pour éviter les difficultés sérieuses, le syndic et le conseil syndical devraient envisager avec bienveillance cette procédure de mandat ad hoc qui est trop peu appliquée.

En effet, cette mesure permet à l’assemblée générale, au syndic et au conseil syndical de garder le contrôle en concertation avec un médiateur professionnel alors qu’en cas de désignation d’un administrateur provisoire tous les pouvoirs sont confisquées au profit de l’administrateur provisoire.

De plus, la responsabilité du syndic risque d’être engagé s’il ne désigne pas ce mandataire alors même que les impayés ont franchi le seuil.

Le Cabinet BJA se tient à l’entière disposition des copropriétés qui sont intéressées pour enfin appliquer ce dispositif.

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