Loi ELAN : parties communes spéciales et modification du règlement

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Afin de tenir compte des parties communes « spéciales » la loi Elan impose et facilite la modification des règlements de copropriété.

Pour rappel, la copropriété est un régime original distinguant le droit de propriété privative sur l’appartement lui-même et le droit de propriété indivise sur les parties communes de l’immeuble, droits indivisiblement liés l’un à l’autre.

Le règlement de copropriété, en tant que charte de l’immeuble, se doit de distinguer le plus précisément possible, la propriété des parties privatives des copropriétaires de celles des parties communes.

Cette distinction cardinale a des conséquences nombreuses au regard notamment des règles d’entretien, du régime de responsabilité en cas de sinistre et du règlement des charges de copropriété.

Toutefois, un mouvement d’individualisation en copropriété a justifié la consécration en jurisprudence de l’existence de parties communes particulières : à savoir les parties communes spéciales et les parties communes à droit de jouissance exclusif.

La loi ELAN adoptée le 23 novembre 2018 impose la modification des règlements de copropriété afin de tenir compte de l’existence de ces parties communes particulières.

En outre, cette loi clarifie et apporte de nombreuses précisions quant à leurs régimes.

Enfin, si la loi ELAN impose la modification des règlements, elle accorde aussi un régime de faveur pour le vote de ces modifications dans les 3 ans à compter de son adoption (d’ici le 24 novembre 2021).

La modification des règlements qui doit en principe être votée selon la règle de l’unanimité peut être votée à la majorité simple des personnes présentes ou représentées.

Le cabinet BJA propose un décryptage de cette évolution importante ainsi que des modèles de résolutions à intégrer lors des prochaines assemblées générales.

Cet article concerne uniquement les parties communes spéciales, le suivant concernera les parties communes à jouissance privative.

Quelles sont les précisions apportées concernant les parties communes spéciales ?

La notion de parties communes spéciales était abordée en creux par la loi du 10 juillet 1965 au sein de ses articles 3 et 4. Ces parties étaient définies comme pouvant être la propriété de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux.

Les copropriétaires souhaitant de moins en moins être tenus de participer aux charges communes pour bâtiments dont ils ne font pas parties ou des équipements qu’ils n’utilisent pas, des clefs de répartition ont été adoptées en pratique afin de répartir les charges entre ces seuls copropriétaires.

L’article 6-2, nouveau, de la loi du 10 juillet 1965 créé par la loi ELAN, précise le régime juridique des parties communes spéciales :

« Les parties communes spéciales sont celles affectées à l’usage et à l’utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers.

La création de parties communes spéciales est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacune d’entre elles.

Les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage et à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes »

Cet article reprend la formulation du projet de réforme GRECCO disposant que l’existence de ces parties est indissociable de l’établissement de charges spéciales. Le projet GRECCO indiquait utilement « et inversement » mais cet ajout n’a pas été repris dans cet article.

La loi ELAN ajoute la possibilité de se réunir au sein d’une assemblée générale spéciale pour les décisions concernant ces seules parties, il s’agit d’une nouveauté qui pourrait utile surtout dans des grands ensembles, par exemple afin d’éviter d’avoir à constituer des syndicats secondaires.

Le vote peut également intervenir en assemblée générale où les seuls copropriétaires concernés par les parties communes spéciales participent au vote.

Avant l’adoption de la loi ELAN, l’article 24, III, de la loi du 10 juillet 1965 prévoyait déjà que ce vote par les seuls copropriétaires pouvait avoir lieu mais uniquement pour les dépenses votées à la majorité de l’article 24 et si le règlement le prévoyait. Ces conditions étaient rarement réunies.

Désormais, les dispositions nouvelles sont heureuses puisqu’elles s’appliqueront en tout état de cause, pour toutes les décisions et quelle que soit la majorité applicable.

Quelles sont les modifications des règlements de copropriété imposées par la loi ELAN ?

En plus des précisions sur le régime, la loi ELAN ajoute une indication considérable en soumettant l’existence des parties communes spéciales et des parties communes à jouissance privative à leur mention expresse dans le règlement de copropriété.

En effet, l’article 6-4, nouveau dispose :

« L’existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété ».

L’article 209 II de la loi ELAN prévoit pour favoriser le vote de cette modification que :

« Les syndicats des copropriétaires disposent d’un délai de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi pour mettre, le cas échéant, leur règlement de copropriété en conformité avec les dispositions de l’article 6 4 de la loi n° 65 557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.

À cette fin, le syndic inscrit à l’ordre du jour de chaque assemblée générale des copropriétaires la question de la mise en conformité du règlement de copropriété. La décision de mise en conformité du règlement de copropriété est prise à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents ou représentés.»

Ainsi, les syndicats et les syndics auront l’obligation d’inscrire à l’ordre du jour des assemblées générales, dans les trois années qui suivent la promulgation de cette loi, la modification du règlement de copropriété pour le mettre en conformité.

Dès lors, chaque règlement de copropriété devra être modifié afin de préciser la liste exhaustive des parties communes spéciales et fixer l’étendue des droits correspondants.

Aussi,  une modification pourrait avoir lieu à la majorité simple afin de régulariser des clefs de répartition spéciales utilisées sans que le règlement de copropriété ne les mentionne.

Toutefois, il est regrettable que la loi ne soit pas plus explicite sur la notion « de mise en conformité » alors que la modification de la répartition des charges est une modification importante affectant les droits et devoirs de tous les copropriétaires. D’autant que on vote à la majorité simple ce qui va impacter ce que Cicéron désigne comme « le nerd de la guerre » les enjeux financiers entre les copropriétaires : la répartition des charges !

Projet de résolution : modification du RCP afin de reconnaître des parties communes spéciales (article 209 de la loi ELAN) :

« L’assemblée générale, au vu de l’usage des parties communes spéciales suivantes ……………ou des clefs de répartition suivantes  …………….., décide de réaliser la mise à jour du règlement de copropriété afin que ces parties ou clefs de répartition soit régularisés en qualité de parties communes spéciales concernant les seuls copropriétaires suivants : ….. ».

Il est rappelé qu’en application du nouvel article 6-2 de la loi du 10 juillet 1965 que « la création de parties communes spéciales est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacune d’entre elles. Les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage et à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes »

L’assemblée générale, approuve, cette modification et sollicite la désignation d’un géomètre expert aux fins de détermination de la superficie et d’un notaire aux fins de la modification et de publication du règlement de copropriété.

Recommandations du cabinet BJA :

Désormais, l’assemblée générale approuvant les comptes d’une copropriété n’établissant pas des charges communes spéciales pour des parties communes spéciales pourrait être contestée. En outre, la loi Elan impose la modification des règlements de copropriété afin de régulariser notamment les situations dans lesquels des clefs de répartition spéciales étaient utilisés sans que le règlement ne mentionne les parties communes spéciales correspondantes. Au regard du contrat type, ces modifications du règlement de copropriété font partie des prestations particulières pouvant donner lieu au versement d’une rémunération spécifique complémentaire pour le syndic. Le cabinet BJA accompagne les syndics et les copropriétaires pour adapter les règlements de copropriété. La prochaine newsletter prolongera ces développements et concernera les parties communes à jouissance privative. En effet, certains de ces droits privatifs sont menacés…

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