Ordonnance de la copropriété du 30 octobre 2019 : comment réagir avec ELAN ?

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Dans le cadre de notre précèdent article, nous avions introduit le contexte de l’ordonnance du 30 octobre 2019, applicable à compter du 1er juin 2020. A ce titre, la lecture du rapport du 31 octobre 2019 au Président de la République nous éclaire sur les intentions du gouvernement concernant ces nouvelles dispositions.

Cette ordonnance majeure réforme les règles de gouvernance en copropriété (I), facilite la prise de décision en assemblée générale (II), prévoit des régimes en fonction de la taille et la destination des immeubles (III) et simplifie le droit de la copropriété (IV).

Nous avions développé le I) uniquement sur lequel nous revenons afin d’apporter des précisions complémentaires et répondre à certaines questions reçues, puis nous vous livrons nos développements sur les autres parties.

I) La nouvelle gouvernance : évolution du rôle du Conseil syndical, du Syndic et du Syndicat des copropriétaires

A) Nouveau rôle du conseil syndical
A.1 La délégation élargie : vers une cogestion ?

(Ord. art. 21 : loi du 10.7.65 : art. 21-1 à 21-5 nouveaux.)

L’assemblée générale peut confier au conseil syndical une délégation sur tout ou partie des décisions votées à la majorité de l’article 24, par exemple des travaux d’entretien, de ravalement obligatoire ou encore la suppression des vides ordures pour des raisons d’hygiène.

Dans l’ancien régime, le Conseil syndical pouvait recevoir une délégation uniquement pour une opération déterminée, désormais il pourrait avoir plus de latitude afin par exemple de choisir l’entreprise, fixer le montant du marché, la date d’exigibilité des appels de fonds, déterminer les honoraires du syndic et souscrire la police assurance.

L’assemblée générale fixe le montant maximum des sommes allouées. Dans le cadre de sa mission le conseil syndical peut « prendre conseil auprès de toute personne de son choix. Il peut aussi, sur une question particulière, demander un avis technique à tout professionnel de la spécialité. Les dépenses nécessitées par l’exécution de la mission du conseil syndical constituent des dépenses courantes d’administration. Elles sont supportées par le syndicat et réglées par le syndic. » (Article 27.2 du décret du 17 mars 1967).

Il ne s’agit pas véritablement d’une cogestion en raison des nombreux garde-fous prévus :

  • le vote d’une délégation d’une durée maximale de deux ans est décidée par l’assemblée générale, à la majorité de l’article 25, cette dernière détermine le montant maximum des fonds alloués. La résolution de délégation devrait fixer la date des appels de fonds correspondants afin qu’il ne s’agissent pas d’un « chèque en blanc » ;
  • les décisions prises par le Conseil Syndical, composé d’au moins trois membres, sont prises à la majorité de ses membres avec voix prépondérante du Président en cas d’égalité. Le Conseil établit un rapport en vue de l’information des copropriétaires et rend compte de l’exercice sa délégation lors de l’assemblée générale votant l’approbation des comptes ;
  • le syndicat doit souscrire une assurance responsabilité pour chacun des membres du conseil syndical ; mais surtout
  • la délégation ne peut pas concerner les décisions les plus importantes à l’instar de l’approbation des comptes, la détermination du budget prévisionnel et l’adaptation du règlement de copropriété.

En outre, il convient de noter que l’article 25a) concernant cette délégation a également été modifiée pour supprimer dans le cadre de la délégation «la mise en application et le suivi des travaux et contrats financés dans le cadre du budget prévisionnel de charges ».

Cette mission de gestion des travaux et suivi des marchés relevant du mandat type du syndic serait une trop lourde responsabilité pour les membres du conseil syndical qui ne devrait donc pas par exemple procéder au suivi du chantier et à la réception des travaux.

A.2 L’assignation du Syndic en cours de mandat : des effets pervers ?

(Ord. art. 12 / loi du 10.7.65 : art. 15)

Le président du conseil syndical sur délégation de l’assemblée générale des copropriétaires voté à la majorité de l’article 25 peut agir à l’encontre du syndic en cours de mandat pour inertie ou carence du syndic.

Dans le cadre du précèdent article, nous avions critiqué ce dispositif car il paraît préférable de révoquer le syndic et d’agir à son encontre par la suite plutôt que de le conserver et d’agir contre lui car sans confiance difficile de travailler ensemble.

Cet avis est partagé en doctrine : « cela n’est pas fait pour pacifier les relations entre le syndic et les copropriétaires ! pourquoi créer cette côte mal taillée ? nous connaissions la révocation du syndic assortie éventuellement d’une action en responsabilité. Quel est l’intérêt d’agir contre le syndic en place ? » (Jean Marc Roux, La Copropriété sur Ordonnance, page 44, édition Edilaix décembre 2019).

A l’inverse, l’association des responsables de copropriété (ARC) estime au moyen d’une analogie douteuse, que s’il est bon de pouvoir agir à l’encontre de son médecin ou son avocat, on devrait le pouvoir également à l’encontre de son syndic.

Cependant, il nous est permis de douter qu’en cas d’inertie du médecin lors d’une opération complexe, Monsieur Emile Hagège, conserve le même médecin pour la suite des opérations alors même qu’il vient d’attraire ce dernier en justice pour avoir échoué lors de la première partie de l’intervention…

A.3 La mise en concurrence systématique : se tirer une balle dans le pied ?

(Ord. art. 20 : loi du 10.7.65 : art. 21)

Dans le régime actuel, tous les trois ans, le mandat du syndic doit être mis en concurrence par le conseil syndical et au cours de l’année précèdent cette mise en concurrence une dispense peut être votée en assemblée générale.

Le nouveau régime prévu est plus sévère : feu la périodicité triennale, à chaque assemblée générale votant sur la désignation du syndic, le conseil syndical devra mettre en concurrence plusieurs projets de contrat de syndic.

Si les relations étaient bonnes entre le syndic et le conseil syndical la dispense de mise en concurrence était souvent votée. En effet, cette question de la dispense était systématiquement mise à l’ordre du jour par le syndic à l’assemblée générale précédant cette désignation. Cette dispense risque d’être plus rare :

« (…) est supprimée l’inscription obligatoire de la question de la dispense de mise en concurrence de projets de contrats de syndic à l’ordre du jour de l’assemblée générale précédant celle appelée à se prononcer sur le renouvellement du syndic. Son caractère systématique pouvait en effet laisser croire, à tort, à certains copropriétaires qu’ils étaient tenus de dispenser le conseil syndical de son obligation de mise en concurrence. La demande de dispense de mise en concurrence est désormais laissée à l’initiative du conseil syndical, lorsqu’il estimera inutile de comparer les prestations proposées par son syndic en exercice avec d’autres offres au regard de leur qualité et de leur coût.» (rapport du 31 octobre 2019 au Président sur l’ordonnance  sur l’ordonnance)

Ainsi, il appartiendra désormais au conseil syndical de faire inscrire cette dispense.

En application de l’ordonnance, le mandat du syndic ne pourra pas être mis en cause pour défaut d’accomplissement de cette formalité qui n’est pas prescrite à peine de nullité.

A.4 La composition du Conseil Syndical : un sceau d’infamie pour les proches du syndic ?

Ne peut être membre du conseil syndical : « Le syndic, ses préposés, leurs conjoints, leurs partenaires liés à eux par un pacte civil de solidarité, leurs concubins, leurs ascendants ou descendants, leurs parents en ligne collatérale jusqu’au deuxième degré, même s’ils sont copropriétaires, associés ou acquéreurs à terme, ne peuvent être membres du conseil syndical. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables aux syndicats gérés par des syndics non professionnels. »

Il est remarquable que le président de séance devrait avoir une bonne intimité avec son syndic et ses salariés afin de connaître leurs éventuels concubins : de sacrées investigations en perspective…

A l’inverse, le copropriétaire peut proposer son ascendant ou son descendant en qualité de membre du conseil. Cette disposition est utile par exemple lorsque les parents ne parlent pas le français et qu’en pratique leurs enfants géraient ces affaires pour leurs comptes.

B) Nouveau rôle du syndic
B.1 Le maintien du contrat type : un carcan rigide renforcé ?

(Ord. art. 10 et 16 : loi du 10.7.65 : art. 10-1 et 18-1-A)

Le contrat type prévoit que le syndic facture uniquement un forfait pour ses missions de syndic énuméré de manière non-exhaustive et des honoraires complémentaires pour les prestations particulières complémentaires listées de manière limitative.

Dès lors que les prestations sortent de ce cadre, les gestionnaires de copropriétés sont contraints de réaliser gratuitement de nombreuses missions et de ne pouvoir facturer certaines prestations demandées en pratique à l’instar du « pré-état-daté » ou des prestations privatives par exemple demander l’intervention d’un plombier sur une canalisation privative.

Le contrat type est non seulement maintenu mais aussi il est prévu de le sanctionner : la DGCCRF pourrait prononcer une amende administrative de 15.000€uros à l’encontre d’un syndic professionnel ne respectant pas fidèlement le contenu contrat type et ne fournissant pas la nouvelle fiche d’information lors de sa désignation.

En effet, un nouvelle obligation d’information a été prévue : le projet de contrat de syndic devra être accompagné d’une fiche d’information indiquant le prix et les prestations proposées selon un modèle fixé par arrêté (à paraître afin de fixer le contenu précis de cette fiche).

B.2 Le syndic mandataire devient prestataire : de nouvelles prestations ?

(Ord. art. 10 et 16 : loi du 10.7.65 : art. 10-1 et 18-1-A)

Les fédérations (FNAIM, UNIS etc.) relayant des demandes pour ajouter plus de flexibilité ont soutenu l’adoption du contrat socle.

Ce souhait a été entendu par les pouvoirs publics : une convention de prestation de services pourra être proposée concernant des prestations de services « hors de la mission de syndic ».

Selon notre première analyse, s’il s’agit de mission de conciergerie ou de service à la personne, il faudrait certainement prévoir un bulletin d’adhésion afin que le copropriétaire demandant ces prestations soit partie à cette convention conclue avec le syndicat des copropriétaires, en raison de l’effet relatif des conventions.

Selon notre seconde analyse, cette convention prévue par la loi du 10 juillet 1965 serait indissociable du contrat de syndic, en conséquence, la facturation de ces prestations pourrait se faire sur le fondement de l’article 10-1 de cette loi qui prévoit désormais que sont imputables au copropriétaire : « Les frais et honoraires du syndic afférents aux prestations effectuées au profit de ce copropriétaire. ».

Enfin, l’ARC semble vouloir empêcher cette possibilité en prétendant que les prestations stipulées dans cette convention doivent entrer dans «l’objet social du syndicat » : conservation, entretien et amélioration de l’immeuble :

La mission du syndic étant très proche de celle du syndicat : gestion des copropriétés, cette interprétation empêcherait donc d’intégrer toutes prestations de services dans cette convention et donc toute évolution.

Outre le fait que le syndicat des copropriétaires n’est pas une société avec un « objet social », l’objectif de cette nouvelle convention prévue par la loi est de permettre à une agence immobilière de proposer en plus de son activité de syndic des prestations de services hors de cette mission de syndic, car elle bénéficie d’une carte professionnelle et de nombreuses garanties, à l’inverse de certaines startup ou associations proposant diverses prestations au syndicat ou aux copropriétaires…

B.3 Les nouvelles pénalités à l’encontre du syndic

– les pénalités pour sanctionner le défaut de communication au conseil syndical

(Ord. art. 10 et 16 : loi du 10.7.65 : art. art 21)

Si le syndic ne communique pas au conseil syndical dans le délai d’un mois toutes pièces se rapportant à la gestion du syndic et d’une manière générale à l’administration de la copropriété, il encourt une pénalité de 15 euros par jour qui doit être imputée sur sa rémunération forfaitaire annuel de syndic.

Afin de rendre cette sanction effective, si le syndic ne diminue pas spontanément le montant de ses honoraires afin de tenir compte de cette sanction, le président du conseil syndical pourra demander au Président du Tribunal Judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, la condamnation du syndic au paiement de ces pénalités au profit du syndicat des copropriétaires.

– les pénalités pour sanctionner le défaut de communication de la fiche synthétique

Une pénalité financière imputée au syndic est prévue en l’absence de transmission de la fiche synthétique à un copropriétaire qui en fait la demande, applicable dans un délai d’un mois à compter de ladite demande. Les pénalités par jour de retard sont imputées sur la rémunération forfaitaire annuelle du syndic suivant un montant fixé par décret. Elles sont déduites lors de l’arrêté des comptes.

En pratique la fiche synthétique peut être téléchargée facilement à partir du moment où le syndicat des copropriétaires a été immatriculé. Cette mesure vise indirectement à inciter les syndic immatriculer les copropriétés auprès du registre national.

En revanche, la révocation du mandat du syndic prévue à titre de sanction en cas de défaut de communication de la fiche synthétique est supprimée pour ne pas perturber la gouvernance de la copropriété.

B.4 La résiliation du mandat : la nouvelle démission et révocation ?

(Ord. art. 15 : loi du 10.7.65 : art. 18, V, VI ; VII, VIII)

L’effet immédiat de la révocation du contrat de syndic en cours de mandat lorsqu’un nouveau syndic est nommé par l’assemblée générale est supprimée : celle-ci devant intervenir au plus tard un jour franc après la tenue de cette assemblée.

La conséquence pratique est que le syndic ne se fera pas « exclure » sur le champ en assemblée générale, comme cela pouvait parfois avoir lieu de manière vexatoire, ni décider de quitter l’assemblée immédiatement.

De plus, le syndic n’est plus révocable ad nutum en cours de mandat.

Deux possibilités :

  • Le non-renouvellement : Soit le contrat de syndic peut être résilié au cours des trois mois précédant la fin de son contrat sans indemnité, à l’initiative du syndicat des copropriétaires ou du syndic. Dans cette dernière hypothèse, le conseil syndical devra être averti par le syndic dans les trois mois précédant la tenue de cette assemblée générale ; En tout état de cause, la résolution devrait indiquer la « date anticipée de fin de contrat », et que le reliquat de mandat non exécuté par le syndic à compter de cette date ne pourra pas donner lieu à indemnité contrairement à la dernière jurisprudence (Cass., 3ème Ch. civ., 8 mars 2018, n°17-12506). Cette privation d’indemnité peut sembler injuste ou contraire à la force obligatoire des conventions.
  • La résiliation : soit le contrat de syndic peut être résilié pour inexécution suffisamment grave à l’initiative du syndicat des copropriétaires ou du syndic. A l’initiative du syndicat des copropriétaires : le conseil syndical notifie au syndic une demande motivée d’inscription à l’ordre du jour précisant la nature des manquements reprochés. A l’initiative du syndic : ce dernier devra notifier au Président du conseil syndical les manquements reprochés au syndicat des copropriétaires et convoquer une assemblée générale à l’issue d’un délai minimum de deux mois suivant cette notification. Il s’agit dans un cas de la révocation du syndic qui devra être votée à la majorité de l’article 25, dans l’autre de sa démission.
B.5 Les délais de transmission lors d’un changement de syndic : à l’ère du numérique ?

L’ancien syndic est tenu de remettre au nouveau syndic :

  • dans le délai de quinze jours à compter de la cessation de ses fonctions, la situation de trésorerie, les références des comptes bancaires du syndicat et les coordonnées de la banque. Ainsi, la transition de la gestion financière est facilitée ;
  • Il remet, dans le délai d’un mois à compter de la même date, l’ensemble des documents et archives du syndicat ainsi que, le cas échéant, l’ensemble des documents dématérialisés relatifs à la gestion de l’immeuble ou aux lots gérés mentionnés à l’alinéa 11 du I de l’article 18, dans un format téléchargeable et imprimable. ;
  • Dans le délai de deux mois suivant l’expiration du délai mentionné ci-dessus, l’ancien syndic est tenu de fournir au nouveau syndic l’état des comptes des copropriétaires ainsi que celui des comptes du syndicat, après apurement et clôture. » ;

A défaut, le syndic dans un premier temps met en demeure l’ancien syndic de lui remettre pièces, informations et documents dématérialisés mentionnés, à défaut, il agit à son encontre devant le Tribunal Judiciaire en référé afin d’obtenir sa condamnation sous astreinte.

Sous le régime antérieur, l’action était diligentée comme en la forme des référés, ce qui permettait d’obtenir en plus des dommages et intérêts et d’éviter que par des contestations sérieuses l’affaire soit renvoyée au fond.

C) Nouvel équilibre entre les droits et devoirs du syndicat des copropriétaires et du copropriétaire
C.1 Les droits et devoirs du copropriétaire

– La convocation à l’initiative d’un seul copropriétaire : combien d’AG par an et quel coût ?

(Ord. art. 23: loi du 10.7.65 : art. 17-1AA)

Le copropriétaire peut convoquer seul et à ses frais une assemblée générale concernant ses seuls droits et obligations.

Le délai laissé au syndic pour l’organisation de cette assemblée générale devrait être précisé par décret.

Il s’agira certainement de demande de vote de travaux prévue à l’article 25 b :

« L’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci »

Par exemple des demandes concernant le percement d’un mur porteur et la pose d’une poutrelle IPN.  Par contre, la cession d’un couloir partie commune ne semble pas être une décision « ne concernant que ses droits ou obligations ».

Les frais qui seront à la charge du copropriétaire dépendront du nombre de copropriétaires et pourront être élevés si l’immeuble à plus de 100 copropriétaires.

Par ailleurs, on peut craindre que si ce dispositif est très utilisé de nombreuses assemblées générales soient convoquées désintéressant ainsi les autres copropriétaires, et que ces décisions soient finalement adoptées par le copropriétaire seul, en seconde lecture grâce à la passerelle, s’il détient plus du tiers des voix.

– Les travaux d’accessibilité réalisés et notifiés par le copropriétaire : peut-il réaliser ces travaux sans attendre ?

(Ord. art. 27 : loi du 10.7.65 : art. 25-2 nouveau)

Afin de faciliter ces travaux sur les parties communes notamment dans les immeubles ne comportant que des logements, il est prévu que le copropriétaire peut faire réaliser à ses frais les travaux d’accessibilité et notifie au syndic sa demande.

Jusqu’à la réception des travaux, le copropriétaire exerce les pouvoirs du maître d’ouvrage.

Il notifie une demande d’inscription d’un point d’information à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale accompagnée du descriptif détaillé des travaux envisagés.

Le syndic ajoutera une résolution soumise au vote afin que les copropriétaires puissent s’opposer à la majorité des voix de tous les copropriétaires à la réalisation de ces travaux sur décision motivée par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements essentiels ou par leur non-conformité à la destination.

Cette notion de « décision motivée » est inédite : l’assemblée générale devra motiver sa décision, à défaut, cette résolution risquerait d’être annulée dans le cadre d’une action en contestation. En dépit, de ce nouveau dispositif, il semble plus prudent pour le copropriétaire d’attendre le vote indiquant l’absence d’opposition du syndicat pour entreprendre « les travaux envisagés ».

C.2 Les droits et devoirs du syndicat des copropriétaires

– La responsabilité de plein droit pour les dommages causés dans les parties communes ?

(Ord. art. 11: loi du 10.7.65 : art. 14)

Sous le régime antérieur, le syndicat était responsable uniquement des dommages causés par « le vice de construction ou le défaut d’entretien des parties communes ».

Cette extension de sa responsabilité risque d’augmenter le coût des primes d’assurance voire de provoquer encore plus de résiliations.

De plus le syndicat des copropriétaires est également en charge de « l’amélioration » des parties communes ce qui vise certainement l’adoption de travaux d’efficacité énergétique.

– La réalisation des travaux d’intérêts collectifs : le copropriétaire doit-il ouvrir sa porte ?

(Ord. art. 8 / loi du 10.7.65 : art.9)

En cas de travaux d’intérêts collectifs le copropriétaire a l’interdiction de faire obstacle à leur réalisation au sein de ses parties privatives.

Cette obligation n’est donc plus limitée à certaines catégories de travaux et s’impose au copropriétaire. Le copropriétaire peut en cas de privation temporaire totale de son lot solliciter auprès de l’assemblée générale une indemnité provisionnelle à valoir sur le montant de l’indemnité définitive.

II) La prise de décision facilitée en assemblée générale

A) Le vote à distance par voie de formulaire : les débats deviennent inutiles ?

(Ord. 35 / loi du 10.7.65 : art. 17-1 A)

Lorsque le copropriétaire ne souhaite pas être présent lors de l’assemblée générale, plutôt que de donner un pouvoir à un autre copropriétaire qui pourrait trahir son instruction de vote, il pourra envoyer son formulaire en courrier recommandé au syndic sur la base des projets de résolutions reçus avec sa convocation et du formulaire de vote par correspondance.

Il est précisé que le formulaire permettant l’exercice du vote par correspondance sera établi conformément à un modèle fixé par arrêté.

Lors de la première version de ce dispositif prévu par la loi ELAN du 23 novembre 2018, il était prévu qu’en cas d’abstention ou d’absence d’indication de vote dans le formulaire remis par le copropriétaire, ces votes étaient présumés négatifs. De plus, en cas d’évolution substantielle de la résolution en cours d’assemblée générale, le vote positif indiqué dans le formulaire était requalifié en vote négatif.

Cette version était très critiquée compte tenu du risque important d’empêcher la prise de décision en assemblée générale. Par exemple si les copropriétaires remplissent de manière incomplète les formulaires, de nombreux votes auraient été réputés négatifs. Heureusement, ces dispositions n’ont pas été reprises.

Désormais, il est uniquement prévu que si la résolution objet du vote par correspondance est amendée en cours d’assemblée générale, le votant par correspondance ayant voté favorablement est assimilé à un copropriétaire défaillant pour cette résolution.

Ainsi, il pourra dans un délai de deux mois à compter de sa notification agir en contestation. Ce dispositif paraît plus juste, toutefois, il conviendra de veiller à ne pas faire évoluer une résolution, même dans l’intérêt des copropriétaires, au risque de souffrir d’une contestation.

La dérive : le copropriétaire ne participant pas aux débats en votant avant la tenue de l’assemblée générale ne sera pas éclairé et n’aura pas pu entendre les arguments de ceux qui plaident pour l’adoption de telles résolutions ou de tels travaux. Par exemple, certains copropriétaires bailleurs – non-occupants – qui refusent systématiquement les travaux risquent de prendre le pouvoir au détriment des personnes présentes dans l’immeuble et en assemblée générale.

B) L’abaissement de certaines majorités : les absents ont toujours tort ?

(Ord. 24 et 25/ loi du 10.7.65 : art. 24 et 25)

Des résolutions sont souvent difficiles à prendre en raison de l’absentéisme. Chaque nouvelle réforme apporte donc un abaissement des règles de majorités :

  • Le vote des travaux d’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite ne se votera plus à la majorité de l’article 24, nous avons vu plus haut que lorsqu’ils sont réalisés par le copropriétaire, ce dernier en informe le syndic afin de procéder à un point d’information sans vote et à une résolution de vote en cas d’opposition motivée du syndicat des copropriétaire à la majorité de l’article 25 ;
  • La suppression des vide-ordures pour des impératifs d’hygiène est décidée à la majorité de l’article 24 e), et non plus de l’article 25.
  • l’autorisation permanente accordée à la police ou à la gendarmerie nationale de pénétrer dans les parties communes (art. 24, h) et non plus à la majorité de l’article 25 (par exemple en cas de trafic de drogue dans la copropriété, la police pourrait refuser d’entrer à la demande du syndic si cette autorisation n’a pas été votée).
  • Les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles sont décidées à la majorité de l’article 25 et non plus 26. Il est précisé qu’en cas de fermeture totale de l’immeuble, celle-ci doit être compatible avec l’exercice d’une activité autorisée par le règlement de copropriété (art. 25, g).
  • La délégation de pouvoir au président du conseil syndical d’introduire une action judiciaire contre le syndic en réparation du préjudice subi par le syndicat des copropriétaires, désormais prévue à l’article 15 de la loi de 1965, est votée à la majorité de l’article 25.

L’abaissement des majorités pour adopter les résolutions a pour intérêt de favoriser l’adoption de résolution avec moins de présents. L’inconvénient est que ces nouvelles majorités n’encouragent pas les copropriétaires à se manifester afin de prendre part aux débats, aux votes et à s’intéresser à la vie en communauté.

C) Les passerelles : des « boulevards » ou des « viaducs » ?

Ces expressions ont été employées lors du colloque de la chambre nationale des experts de copropriété du 13 décembre 2019 : les nouvelles possibilités de passerelles permettent de voter en second lecture à une majorité plus faible. Elles ouvrent la voie à l’adoption de nombreuses résolutions.

  • La passerelle modifiée de l’article 25-1 de la loi du 10 juillet 1965

(Ord. 27/ loi du 10.7.65 : art. 25-1)

« Lorsque l’assemblée générale des copropriétaires n’a pas décidé à la majorité des voix de tous les copropriétaires, en application de l’article 25 ou d’une autre disposition, mais que le projet a recueilli au moins le tiers de ces voix, la même assemblée se prononce à la majorité prévue à l’article 24 en procédant immédiatement à un second vote. »

Cette application généralisée de la passerelle permet de fluidifier le vote.

Son champ d’application est étendu :

  • A toutes les dispositions  qui se votent à la majorité de l’article 25

Sous le régime antérieur, la passerelle n’était pas applicable pour les travaux d’amélioration ou pour la demande d’individualisation des contrats de fourniture d’eau et la réalisation des études et travaux nécessaires à cette individualisation (il s’agissait de l’exclusion des articles 25 n) et o).

  • lorsqu’un autre texte prévoit le vote à la majorité des voix de tous les copropriétaires

Ainsi, la passerelle est applicable pour voter la création d’un syndicat secondaire (article 27) ou une opération de scission (article 28).

Néanmoins, on note la suppression de la possibilité de convoquer une seconde assemblée lorsque le minimum du tiers n’a pas été obtenu. En effet, ce passage en seconde lecture est parfois ressenti comme un passage en force. De plus, l’obligation de convoquer une nouvelle assemblée génère de nouveaux frais pour des décisions votées qui finissent souvent par être contestées.

  • La passerelle de l’article 26-1 de la loi du 10 juillet 1965

(Ord. 29/ loi du 10.7.65 : art. 26-1)

La double majorité de l’article 26 n’est plus comme d’antan une citadelle imprenable et inaccessible.

« Nonobstant toute disposition contraire, lorsque l’assemblée générale n’a pas décidé à la majorité prévue au premier alinéa de l’article 26 mais que le projet a au moins recueilli l’approbation de la moitié des membres du syndicat des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance, représentant au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, la même assemblée se prononce à la majorité des voix de tous les copropriétaires en procédant immédiatement à un second vote. »

Lorsque la moitié des membres représentant le tiers des voix de tous les copropriétaires se prononcent en faveur du projet, sans attendre, lors de la même assemblée, les copropriétaires votent à la majorité de l’article 25 sur les décisions concernant notamment les actes d’acquisitions immobilières et de disposition, la modification du règlement de copropriété concernant la jouissance des parties communes et la suppression du poste de concierge.

Lors du colloque de la CNEC, le professeur Hugues Périnet-Marquet a indiqué que si en seconde lecture la majorité 25 n’est pas obtenue, il ne serait pas possible de passer « façon tarzan » d’une passerelle à une autre pour finir à la majorité de l’article 24 : il s’agit d’un « second vote » et non d’un deuxième vote.

La dérive : avec le mécanisme des passerelles le risque a été soulevé que certains copropriétaires aux revenus les plus faibles se voient imposer des décisions coûteuses à une majorité plus faible, par exemple des travaux d’amélioration, une scission ou une surélévation etc.

D) Les autres simplifications : les emprunts collectifs, le vote en cas de démembrement de copropriété et notification du PV D’AG
  • Le vote d’un emprunt collectif concernant des travaux d’intérêt collectif sur des parties privatives

(Ord. 27/ loi du 10.7.65 : art. 25-2 et 25-3)

Lorsque l’assemblée générale se prononce sur ces travaux prévus à l’article 26-4, la question de la souscription d’un emprunt collectif destiné à financer ces travaux est inscrite à l’ordre du jour de la même assemblée générale (art.25-3).

Le délai de réponse des copropriétaires qui décident de participer à l’emprunt collectif est unifié : la notification au syndic de leur décision doit, à peine de forclusion, intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal, sans ses annexes, pour tous les copropriétaires (art.26-4). Auparavant, pour les copropriétaires défaillants ou opposants, le point de départ du délai courait à compter de la tenue de l’assemblée générale.

  • Les règles de représentation en cas de démembrement de copropriété

Les indivisaires sont représentés par un mandataire commun, qui est désigné par le Président du Tribunal Judiciaire si aucun accord n’est trouvé.

En cas d’usufruit, les intéressés sont représentés par le nu-propriétaire à défaut d’accord. En cas de pluralité d’usufruitiers, ces derniers sont représentés par un mandataire commun, désigné par le Président du Tribunal Judiciaire, à défaut d’accord.

Cette disposition présente un inconvénient, si le nu-propriétaire vote des résolutions qui sont défavorables à l’usufruitier.

La désignation du mandataire commun se fait aux frais des indivisaires ou des nus propriétaires, le syndicat des copropriétaire ne supportera pas in fine ces dépenses.

  • La notification du procès vers d’assemblée générale : sans les annexes

(Ord. 37 / loi du 10.7.65 : art. 42)

Le PV d’AG qui est notifié aux copropriétaires dans un délai d’un mois depuis la loi du 23 novembre 2018 pourra être adressé sans verser dans le pli les annexes. Si le copropriétaire veut prendre connaissance de ces annexes il pourra demander au syndic de lui en délivrer des copies ou les consulter sur l’extranet.

III) La copropriété en fonction de la taille ou de la destination

Le statut de la copropriété a été particulièrement pensé pour des copropriétés à destination d’habitation. Conformément à son habilitation, l’ordonnance du 30 octobre 2019 prévoit des possibilités de sortir du caractère impératif de ce statut dans certaines conditions. De plus des régimes dérogatoires applicables de plein droit ont été prévus pour les copropriétés de petites tailles.

A) L’exclusion possible du statut de la copropriété selon la destination : vers un régime à la carte ?

L’article 1 de la loi du 10 juillet 1965 entrant en vigueur au 1er juin 2020 permettra à certaines catégories d’immeubles ou d’ensembles immobiliers de déroger au statut de la copropriété qui s’applique de manière supplétive.

Il s’agit des :

  • immeubles ou groupe d’immeubles bâtis à destination totale autre que d’habitation dont la propriété est répartie par lots entre plusieurs personnes (centres commerciaux, bureaux…) ;
  • ensembles immobiliers qui, outre des terrains, des volumes, des aménagements et des services communs, comportent des parcelles ou des volumes, bâtis ou non, faisant l’objet de droits de propriété privatifs (lotissement, cour commune..)

Pour ne pas appliquer le statut de la copropriété, une convention devra être conclue y dérogeant expressément et mettant en place une structure dotée de la personnalité morale afin de gérer les éléments et équipements communs à l’instar d’une association syndicale libre (ASL) ou d’une association foncière urbaine libre (AFUL) ou autre (union de syndicat, GIE, association etc.)

Il serait ainsi possible pour les promoteurs de proposer des schémas innovants par exemple dans le cadre d’une ASL où il est possible de reprendre une partie des règles du statut de la loi du 10 juillet 1965 mais aussi d’y déroger pour partie. En effet, il n’est plus prévu comme dans le régime antérieure de prévoir une « organisation différente » au statut de la copropriété.

Dans les grand ensembles, cette faculté pourrait dispenser les copropriétaires de mettre en œuvre des montages complexes comme la scission en volumes ou la constitution de syndicats secondaires.

Pour les ensembles immobiliers et immeubles préexistants et réunissant ces critères, il serait également possible de sortir du régime de la copropriété par une convention votée en assemblée générale à l’unanimité des voix des copropriétaires composant le syndicat.

B) Les « petites copropriétés » et la « copropriété à deux » : du droit de la copropriété aux droits des copropriétés ?

Si le régime de la copropriété n’est toujours pas adapté compte tenu du gigantisme de certains ensembles, il présente aussi des inconvénients pour les petites copropriétés et les copropriétés à deux.

A cet égard, l’objectif de la réforme a été d’alléger le formalisme, d’éviter les situations de blocage tout en préservant le caractère protecteur du statut.

  • Les « petites copropriétés » : décider entre nous ?

(Ord. 34 / loi du 10.7.65 : art. 41-8 et s.)

Ces dispositions particulières s’appliquent aux copropriétés de 5 lots ou moins à usage de logements, de bureaux ou de commerces, ou lorsque le budget prévisionnel moyen du syndicat des copropriétaires sur une période de 3 exercices consécutifs est inférieur à 15.000 euros (art.41-8).

« Ce critère alternatif permet d’ouvrir l’accès à ce dispositif (…) à des copropriétés d’environ 10 lots, le budget prévisionnel moyen étant de 1478€uros par lot selon les données du registre d’immatriculation » (rapport au président du 30 octobre 2019).

Ces copropriétés bénéficient de plein droit du statut dérogatoire suivant :

  • la constitution d’un conseil syndical est facultative ;
  • La possible consultation écrite ou « réunion » à la place de la tenue d’une assemblée générale :

Les copropriétaires à l’unanimité pourront décider d’arrêter une décision par écrit, ou à l’occasion d’une réunion, sans convocation ni tenue d’une assemblée générale. Cette mesure ne supprime pas l’assemblée générale annuelle, il est d’ailleurs précisé qu’elle ne porte pas sur la décision d’approbation des comptes. L’initiative de la consultation appartient à un copropriétaire ou au syndic. Dans tous les cas, elle est organisée par le syndic.

  • Le syndicat n’est pas tenu à une comptabilité en partie double : ses engagements peuvent être constatés en fin d’exercice (avant cette dérogation concernait tous les syndicats de moins de 10 lots.)

Par ailleurs, il convient de noter que la dispense d’ouverture d’un compte séparé pour les copropriétés de moins de 15 lots est supprimée et entrera en vigueur le 31 décembre 2020.

  • La copropriété à deux : du mariage à l’indivision ?

(Ord. art. 34 / loi du 10.7.65 : art. 41-13 à 41-23)

La copropriété a deux est souvent décriée et comparée à un mariage sans possibilité de divorce. La principale situation de blocage vient de la règle de la réduction des voix du copropriétaire majoritaire : en conséquence à défaut d’accord aucune décision ne peut être adoptée.

Afin d’en sortir, cette règle de la réduction des voix est retirée et de nombreuses règles proches du régime de l’indivision sont applicables :

– Les décisions de l’assemblée relevant en principe de l’article 24 peuvent être prises par le copropriétaire détenant plus de la moitié des voix. Celles relevant de l’article 25 seront prises par le copropriétaire détenant au moins deux tiers des voix. En tout état de cause, chaque copropriétaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation de l’immeuble en copropriété, même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence (art. 41-16).

– toutes mesures conservatoires et décisions mentionnées à l’article 41-16, sauf celles portant sur le budget prévisionnel et l’approbation des comptes, peuvent être prises sans réunion de l’assemblée générale. Le copropriétaire décisionnaire est chargé de leur exécution.

– Lorsqu’un copropriétaire a fait l’avance des sommes, il peut obliger l’autre copropriétaire à supporter avec lui les dépenses nécessaires (art. 41-17).

– Les deux copropriétaires peuvent se réunir sans convocation préalable et prendre toutes décisions dans les conditions mentionnées à l’article 41-15 ainsi que les décisions relevant de l’unanimité.

–  chaque copropriétaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation de l’immeuble en copropriété, même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence.

IV) La simplification du droit de la copropriété : un rêve ou une réalité ?

La prévention des contentieux est l’objectif poursuivi par l’ordonnance du 30 octobre 2019, elle passe par la clarification et la sécurisation du régime juridique de certaines notions.

A) Le recouvrement des charges de copropriété facilité : cession de partie commune, hypothèque légale, privilège.

(Ord. art. 13,18 et 19 / loi du 10.7.65 : art. 16-1, art.19  et 19-1) 

Afin de procéder au recouvrement, la loi ELAN du 23 novembre 2018 a prévu la super-procédure de recouvrement de l’article 19-2 modifié.

L’ordonnance facilite le recouvrement puisque lors de la cession d’une partie commune, la part du prix découlant de la cession de parties communes revenant à chaque propriétaire lui est remise par le syndic après déduction des sommes exigibles par le syndicat des copropriétaires.

Cette règle s’applique aux ventes conclues après l’entrée en vigueur de l’ordonnance (à partir du 1er juin 2020).

De plus, afin de permettre le cas échéant, l’exécution du jugement, il est prévu que le syndic peut désormais faire inscrire une hypothèque au profit du syndicat, en consentir la main levée et, en cas d’extinction de la dette, en requérir la radiation sans autorisation préalable de l’assemblée générale.

Enfin, ce sont désormais toutes les créances du syndicat de copropriétaires à l’égard d’un copropriétaire qui sont garanties par le privilège immobilier spécial prévu à l’article 2374 du Code civil, et non plus la liste limitative anciennement fixée à l’article 19-1.

Ce privilège porte sur tous les meubles garnissant les lieux appartenant au copropriétaire ainsi que sur les sommes dues par le locataire à son bailleur.  Les meubles garnissant une location meublée ne sont plus exclus de ce privilège.

B) Les entraves levées pour la constitution de syndicats secondaires, la scission, la surélévation
B.1 La constitution de syndicat secondaire

(Ord. art. 31 / loi du 10.7.65 : art. 27)

Lorsqu’une même copropriété comporte plusieurs bâtiments, un ou plusieurs syndicats secondaires peuvent être créés, pour faciliter la gestion.

Le recours au syndicat secondaire est étendu afin de permettre sa constitution, non seulement en présence de plusieurs bâtiments, mais également en présence d’entités homogènes susceptibles de gestion autonome.

Par exemple, lorsqu’en sous-sol, sous une pluralité de bâtiments se trouve un parking, ce dernier pourrait être qualifié d’entité homogène justifiant la création d’un syndicat secondaire, il en irait de même pour un bâtiment séparé en plusieurs espaces avec des accès et des équipements propres pour chaque partie.

B.2 La scission de syndicats

(Ord. art. 32 / loi du 10.7.65 : art. 28) 

Afin de mieux gérer des syndicats de copropriété de grande tailles ou dans le cadre d’opération de promoteurs immobiliers la scission est souvent envisagée.

Il est prévu que « la procédure prévue au présent article peut également être employée pour la division en volumes d’un ensemble immobilier complexe comportant soit plusieurs bâtiments distincts sur dalle, soit plusieurs entités homogènes affectées à des usages différents, pour autant que chacune de ces entités permette une gestion autonome. »

En plus des différentes conditions il était prévu que pour obtenir un agrément avant l’opération il était nécessaire d’obtenir l’avis du maire et l’autorisation du représentant de l’Etat. En pratique ces consultations ne donnent lieu à aucun contrôle et ralentissent l’opération. En conséquence, le nouvel article 28 IV supprime ces exigences.

B.3 La surélévation et le lot transitoire

(Ord. art. 36 / loi du 10.7.65 : art. 35)

La loi Alur accorde un droit de priorité aux copropriétaires du dernier étage sans plus de précisions. Il était alors difficile de départager les copropriétaires entre eux dès lors qu’ils étaient plusieurs à souhaiter acquérir les nouveaux locaux privatifs créés ou les droits de surélévation.

Difficile également pour le copropriétaire de locaux situés sous la surélévation projetée de se faire concurrencer par un autre copropriétaire du même étage mais dont les locaux ne subissaient pas les travaux de surélévation. En pratique, il pouvait subir le chantage d’un copropriétaire prétendant vouloir user de son droit de priorité puis y renoncer contre rémunération.

Afin de résoudre cette difficulté ce droit bénéficie uniquement aux « copropriétaires de locaux situés, en tout ou partie, sous la surélévation projetée » et non plus à ceux « de l’étage supérieur du bâtiment surélevé ».

  • Lot transitoire

Dans le cadre de la réalisation de programmes immobiliers par tranche successives, le statut de la copropriété peut être applicable pour des lots non bâtis composés pour la partie privative d’un droit de construire et d’une quote-part de partie commune. Les lots nées de cette division sont ensuite vendus et les lots transitoires disparaissent.

Cette pratique a été consacrée par la jurisprudence : le copropriétaire du lot transitoire est ainsi tenu de payer les charges de copropriété et doit être convoqué aux assemblées générales.

Dans le cadre de la réforme de la loi ELAN du 23 novembre 2018, le lot transitoire a été consacré à l’article 1 qui prévoit que le lot peut être un lot transitoire.

Il est alors formé « d’une partie privative constituée d’un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser sur une surface déterminée du sol, et d’une quote-part de parties communes correspondante. »

La création et la consistance du lot transitoire doivent apparaître dans le règlement de copropriété et ils doivent être mise à jours avant le 23 novembre 2021, à défauts le lot pourrait être frappé de nullité. (article 206 de la loi du 23 novembre 2018).

Afin de permettre aux maître d’ouvrage de prévoir une éventuelle surélévation, l’article 1 a été modifié afin de retirer la mention concernant « la surface déterminée au sol ».

C) Des régimes précisés : parties communes et règlement de copropriété, imputabilité des charges, servitudes, fiche synthétique et disparition du syndicat
C.1 Définition des parties communes et règlement de copropriété

(Ord. art. 5 et 6 / loi du 10.7.65 : art. 6-2, 6-3, arti 8 et art 22, al.1)

Le règlement de copropriété doit préciser les charges que le titulaire du droit de jouissance privative supporte.

Le règlement de copropriété doit énumérer, s’il y a lieu, les parties communes spéciales et celles à jouissance privative.

Pour rappel, la mise à jour des règlements de copropriété doit être effectuée avant le 23 novembre 2021, à défaut la responsabilité du syndic pourrait être recherchée.

Par ailleurs, l’article 43 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit le caractère impératif du statut, a été modifié, sont ainsi ajoutées à la liste des clauses réputées non écrites celles dérogeant :

  • au champ d’application du statut de la copropriété (art. 1er) ;
  • à l’entrée en vigueur du statut de la copropriété (art. 1-1) ;
  • aux notifications par voie électronique (art. 42-1).

Il est également précisé que, lorsque le juge répute non écrite une clause relative à la répartition des charges, la nouvelle répartition des charges à laquelle il procède prend effet au premier jour de l’exercice comptable suivant la date à laquelle la décision est devenue définitive.

C.2 L’imputabilité des charges

(Ord. art. 10 / loi du 10.7.65 : art. 10-1

Le syndic facture des charges communes générales en fonction des tantièmes de chacun ou  des charges spéciales en fonction de l’utilité objective des équipements et non plus seulement sur l’utilité (article 10 de la loi du 10 juillet 1965)

Par exception, le syndic peut imputer privativement des charges au copropriétaire selon une liste limitative prévue à l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

La réforme prévoit que sont désormais compris dans cette liste :

  • tous les frais et honoraires du syndicat afférents aux prestations effectuées au profit de ce copropriétaire (opposition au paiement du prix, frais de délivrance de documents sur support papier ou en imputation au titre de la convention de prestation de service cf B.2)
  • les astreintes fixées par lot relatives à des mesures ou travaux prescrits par l’autorité administrative compétente ayant fait l’objet d’un vote en assemblée générale et qui n’ont pu être réalisés en raison de la défaillance du copropriétaire. Il ne s’agit plus uniquement des astreintes visées par le code de la santé publique ou le code de la construction et de l’habitation.
C3 L’interdiction de constituer une servitude

(Ord. art. 4 / loi du 10.7.65 : art. 6-1 A)

Il est jugé qu’une servitude, supposant l’existence de deux fonds distincts, ne pouvait être créée sur une partie commune au profit d’un lot privatif.

Cette interdiction figure au sein du nouvel article 6-1 A de la loi du 10 juillet 1965. En revanche, il est permis de constituer une servitude entre deux lots privatifs.

C.4 La disparition du syndicat

(Ord. art. 39 / loi du 10.7.65 : art. 46-1)

L’article 46-1 prévoit que la réunion de tous les lots entre les mains d’un même propriétaire entraîne ainsi de plein droit la disparition de la copropriété et la dissolution du syndicat des copropriétaires qui ne survit que pour les besoins de sa liquidation, laquelle n’est pas soumise aux dispositions de la loi du 10 juillet 1965.

Le syndic procède aux opérations de liquidation. À défaut, un mandataire ad hoc peut être désigné judiciairement.

Ces disposition entrent en vigueur à compter du 1 juin 2020 en application de l’ordonnance ELAN du 30 octobre 2019.

En propos conclusifs, lors du colloque du 13 décembre, le Président du CNTGI Hugues Périnet-Marquet, a observé qu’après la publication de cette ordonnance deux temps se sont suivis.

D’abord le temps de l’émotion, au cours duquel la presse s’est focalisée sur l’abandon du plan pluriannuel de travaux qui était présent lors de la première version négociée.

Selon les déclarations du Ministre du logement, Julien Denormandie, ce plan obligatoire visant à contraindre les syndicats de copropriété à faire voter les travaux nécessaire, sera intégré lors d’une prochaine loi.

Ensuite, le temps de la raison, un peu plus long, au cours duquel les mérites de cette réforme sont reconnus.

Il s’agit d’une réforme équilibrée fruit d’un consensus dans la mesure où dans le cadre d’une longue concertation ont été entendu les avis des professionnels : fédérations représentants les syndics de copropriétés, associations de consommateurs, membres du CNTGI etc.

Parmi les apports les plus intéressants : les règles concernant la gouvernance – délégation au conseil syndical et contrat socle – les possibilités de déroger au statut et de s’adapter aux spécificités des petites copropriétés.

Enfin consacrer dans la loi les dernières évolutions jurisprudentielles et mieux définir certaines notions devrait favoriser la maîtrise des règles applicables et peut-être limiter certains contentieux.

Le cabinet BJA se tient à votre entière disposition afin de vous mettre en conformité avec ces prochaines obligations.

Il convient de rappeler la chronologie de la réforme ELAN qui intervient en 6 actes :

  • La loi du 23 novembre 2018 qui contient de nombreuses dispositions d’application immédiate et qui autorise le gouvernement à adopter deux ordonnances
  • L’ordonnance du 30 octobre 2019 réformant le droit de la copropriété, prise en application de cette loi, dont les dispositions seront pour la plupart applicables à compter du 1 juin 2020
  • Au mois de janvier 2020, la loi d’habilitation venant ratifier cette dernière ordonnance
  • D’ici le mois de novembre 2020, les décrets d’application de cette dernière loi de ratification
  • Au mois de novembre 2020, la seconde ordonnance instituant le code de la copropriété afin de regrouper, simplifier et renuméroter l’ensemble des règles applicables.
  • D’ici le mois de janvier 2021, la loi d’habilitation venant ratifier cette dernière ordonnance

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