La cession des parties communes spéciales

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Les étapes permettant de vendre une partie commune spéciale ont été indiquées par l’arrêt de la Cour de cassation 20 juin 2022, la note du docteur en droit Jacques Lafond (JCP N2022, n°38, 1223) et le nouveau régime issu de l’ordonnance du 30 octobre 2019.

Quelles sont les étapes préalables ? Comment faire d’une partie commune spéciale un lot ? Qui peut décider de la cession de ce lot ? Qui encaisse le prix de vente ? Combien de résolutions ? Dans quel ordre ? Et à quelles majorités ?

 

Rappel de la distinction entre partie commune générale et partie commune spéciale

Il est rappelé que les parties communes générales sont celles qui sont affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires (article 3 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965).

Sont par exemple réputées parties communes : le gros œuvre des bâtiments, les éléments d’équipement commun, le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d’accès etc.

Les parties communes spéciales ont toujours existé dans la pratique mais leur existence a été pérennisée par la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 dite loi « ELAN », qui les a défini comme étant celles affectées à l’usage et à l’utilité de plusieurs copropriétaires. L’article 6-2 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose en effet :

« Les parties communes spéciales sont celles affectées à l’usage ou à l’utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers. »

Il peut s’agir par exemple de water-closets situés au 1er étage d’un immeuble affectés à l’usage et à l’utilité des copropriétaires du 1er étage uniquement.

Quelles sont les étapes préalables ? 

L’ancienne pratique consistant à prévoir par exemple la vente d’un couloir ou de comble sans définir les tantièmes de copropriété ou de charges ainsi que la superficie carrez n’est plus possible.

En effet, la vente d’une partie commune en tant que telle serait complexe. Dès lors qu’elle concerne une fraction d’immeuble, la vente ne peut avoir pour objet qu’un lot de copropriété.

Aussi, lorsqu’un projet de vente de parties communes est envisagé il appartient aux copropriétaires en lien avec le syndic, avant même de saisir l’assemblée, de prendre contact avec un Géomètre et un Notaire afin de lui demander :

  • D’établir un projet de modification du règlement de copropriété et de l’état descriptif de division, qui tirera les conséquences de la transformation de la partie commune dont la cession est projetée en lot ;
  • De préparer un projet d’acte de vente indiquant les conditions essentielles, droit de préemption, superficie carrez.

Ces projets seront joints à la convocation afin que les copropriétaires puissent se prononcer en pleine connaissance de cause.

Qui peut décider de la vente d’une partie commune spéciale ?

La cession d’une partie commune spéciale doit naturellement faire l’objet d’une décision de l’Assemblée générale.

Toutefois, et dans la mesure où les parties communes spéciales sont l’objet d’une propriété indivise entre certains copropriétaires seulement, seuls ces copropriétaires peuvent décider de leur cession.

En effet, l’article 6-2 de la loi du 10 juillet 1965 précitée dispose que :

« Seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage ou à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes. »

Les autres copropriétaires n’ont donc aucune qualité pour intervenir à ce sujet ; c’est ce que la Cour de cassation a d’ailleurs rappelé dans son arrêt du 1er juin 2022 n°21-16.232.

Dès lors, une résolution de l’Assemblée générale, ayant pour objet la cession d’une partie commune spéciale, qui associerait le vote de tous les copropriétaires serait illégale et encourrait la nullité.

Une assemblée générale spéciale est-elle nécessaire ?

La question se pose légitimement dans la mesure où comme indiqué, seuls certains copropriétaires sont amenés à prendre part au vote.

L’article 6-2 précité nous apporte un nouvelle fois la réponse :

« Les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. »

Aussi, les copropriétaires ont le choix : soit de spécialiser les votes au cours d’une Assemblée générale de tous les copropriétaires, soit de réunir une Assemblée spéciale rassemblant uniquement les copropriétaires ayant des droits sur la partie commune spéciale objet de la vente.

La convocation et la tenue de l’assemblée spéciale obéissent-elles à des règles particulières ?

Si l’assemblée spéciale des copropriétaires titulaires de droits dans la partie commune spéciale se réunit de manière autonome, les mêmes règles que celles prescrites pour les assemblées générales de tous les copropriétaires s’appliquent.

Aussi, l’assemblée spéciale sera convoquée par le syndic et toutes les règles habituelles devront recevoir application.

Si l’assemblée spéciale se tient dans le cadre d’une assemblée générale des copropriétaires, la convocation et l’ordre du jour qu’elle contient devront impérativement distinguer les décisions qui devront être prises par les seuls copropriétaires de la partie commune d’une part et par l’ensemble des copropriétaires d’autre part.

A quelle majorité l’assemblée devra-t-elle se prononcer ?

Comme indiqué précédemment, l’assemblée sera en réalité saisie de deux questions différentes :

  • la création d’un nouveau lot et l’approbation du projet de modificatif de l’état descriptif de division et du règlement de copropriété ;
  • et la vente du lot nouvellement crée.

Aux termes de l’article 11, alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, la modification de la répartition des tantièmes de charges rendues nécessaire par l’aliénation d’une partie commune est décidée à la même majorité que l’aliénation elle-même.

La majorité requise pour prendre la décision d’aliéner une partie commune est celle du droit commun à savoir la double majorité de l’article 26 de la loi de 1965, ou le cas échéant à la majorité réduite prévue par l’article 26-1 de cette même loi (« passerelle »).

Les deux résolutions devront donc être votées à la majorité des deux tiers des voix.

Toutefois, si une telle décision est contraire à la destination de l’immeuble : alors l’unanimité est requise.

Quelles sont les résolutions à inscrire à l’ordre du jour ?

Résolution n°1 : Création d’un nouveau lot issu des parties communes et approbation d’un modificatif :

Majorité de l’article 26 de l’assemblée générale.

L’assemblée générale, après avoir pris connaissance du projet de modificatif joint à la convocation, décide d’approuver le modificatif au règlement de copropriété et à l’état descriptif de division visant à la création du lot [X] issu des parties communes spéciales de l’immeuble, à savoir [préciser].

Résolution n°2 : Cession du nouveau lot :

Majorité de l’article 26, sauf si la vente portait atteinte à la destination de l’immeuble ou aux droits des autres copropriétaires, il faudrait alors l’unanimité

Seuls prennent part au vote les copropriétaires bénéficiant de la partie commune spéciale.

L’assemblée générale, considérant que les copropriétaires bénéficiant de cette partie commune spéciale n’ont plus d’utilité de cette partie commune, n’est pas nécessaire à la destination de l’immeuble et ne préjudicie pas aux droits des autres copropriétaires, donne son accord sur la vente du lot [X] précédemment créé pour un prix de [à préciser] au profit de [à préciser].

  • L’assemblée générale donne mandat au syndic pour faire toutes les déclarations, signer tous compromis à tous actes de vente, en recevoir le prix et donner quittance et généralement faire le nécessaire.
  • L’assemblée générale donne mandat au Syndic pour faire publier l’acte modificatif de l’état descriptif de division et règlement de copropriété rendu nécessaire par la création du lot [X] par tout notaire de son choix.
  • Elle décide en outre que les frais d’acte dont les frais et honoraires de géomètre, du notaire, du Service de la publicité foncière… inclus ceux consécutifs au modificatif du règlement de copropriété, ainsi que les honoraires de transaction du syndic seront à la charge de l’acquéreur OU du Syndicat des copropriétaires [choisir].
  • Elle décide enfin que le solde du produit de la vente, après règlement de tous les honoraires, taxes, frais et débours, sera affecté en charges communes spéciales selon la clef [à préciser]

Qui encaisse le prix de vente ?

Le prix de vente d’une partie commune spéciale doit être réparti entre les seuls titulaires de celle-ci (Cass. 3e civ. 6-5-2014 n° 12-23.810 F-D).

Recommandations du cabinet BJA :

La procédure à suivre pour la vente d’une partie commune spéciale est plutôt délicate et implique de respecter scrupuleusement les différentes étapes précitées. A défaut, la décision prise par l’Assemblée encourt un risque sérieux de nullité. Le cabinet BJA vous accompagne dans le cadre de cette procédure de cession d’une partie commune spéciale, et notamment pour les précisions liées à la rédaction des deux résolutions à inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée précitées.

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