D’après l’article 131-1 du Code de procédure civile et l’article 21 de la loi du 8 février 1995 la médiation est définie comme un « processus structuré […] par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord, par le juge saisi du litige », le Code de procédure civile ajoute que la tierce personne médiateur, a pour mission « d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose ».
La médiation peut être judiciaire ou conventionnelle. Le processus est le même mais la règlementation est différente. La durée de la médiation judiciaire est de trois mois commençant à courir au jour où la provision à valoir sur la rémunération du médiateur est versée entre les mains du médiateur, renouvelable une fois pour une même durée à la demande du médiateur.
La médiation conventionnelle quant à elle, est un processus volontaire qui repose sur l’initiative des personnes, à l’extérieur du système judiciaire. C’est l’article 1528 du Code de procédure civile qui la régit. La médiation conventionnelle a une durée qui sera définie par les parties dans la convention de médiation et par conséquent c’est à elle qu’on a recours lorsque le seul renouvellement, de trois mois, permis par une médiation judiciaire n’est pas suffisant pour trouver un accord.
Pour entrer en médiation, l’élément essentiel est le consentement des parties. L’idée sous-jacente à ce principe est de dire que si l’une des parties est contrainte d’opter pour un mode amiable elle y mettra toute la mauvaise volonté du monde et cela fera perdre du temps à tous. Certes il existe, depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 l’injonction de rencontrer un médiateur, codifiée à l’article 127-1 du Code de procédure civile, mais cette injonction permet simplement au juge saisi du litige d’enjoindre les parties à rencontrer, dans un certain délai (en général si une demande de renvoi est formulée, avant la prochaine date d’audience) un médiateur qui aura pour mission d’informer les parties sur l’objet et le déroulement d’une médiation.
Cette décision est une mesure d’administration judiciaire insusceptible de recours.
Bien souvent cette réunion se déroule en visioconférence et donne lieu à la mise en place d’une mesure de médiation judiciaire.
Le médiateur doit disposer de certaines qualités : la première, impartialité, prévue par l’article 21-2 de la loi du 8 février 1995. Celle-ci consiste en l’absence de parti pris, de préjugés et d’aucun favoritisme envers l’une des deux parties ; elle laisse transparaitre une obligation de neutralité. La deuxième qualité fondamentale du médiateur est son indépendance. Celle-ci impose au médiateur de résister aux pressions provenant de l’extérieur, et d’éviter les conflits d’intérêts. Enfin la médiation, sauf accord contraire des parties, est soumise au principe de confidentialité. Cette confidentialité s’applique tant aux parties qu’aux médiateurs, ou aux personnes susceptibles d’intervenir dans le cadre de la médiation (expert, agent immobilier, conseil syndical…) qui signeront alors un engagement de confidentialité. L’accord des parties sera nécessairement recherché pour toute divulgation des déclarations des parties ainsi que des constatations du médiateur, à un tiers ou lors d’une instance judiciaire.
Ce sont autant de qualités qui donnent à la médiation une impulsion forte et permettent aux parties d’exposer leurs moindres désaccords et points de divergences cristallisant le conflit qui les oppose, sans être jugées ou stigmatisées.
La médiation, contrairement à la conciliation menée par un conciliateur de justice désigné par le ministère de la justice, est payante. Par principe le coût du médiateur est partagé par moitié entre les parties, toutefois une répartition différente peut être pratiquée, toujours avec l’accord de l’ensemble des parties.
Pourquoi choisir la médiation ?
Comme le philosophe Alain a pu l’écrire, « le pire des maux est la justice qui se fait par la force, elle se fait haïr » ; alors pourquoi ne pas adopter une justice « amiable » qui pourrait se traduire par une médiation ?
Du côté des syndicats des copropriétaires, représentés par leurs Syndics, la médiation saura plaire par sa rapidité, son efficacité et sa volonté de mettre un terme à l’ensemble des tensions existants au sein de l’immeuble. En effet, elle durera trois mois, sauf si celle-ci est reconduite pour une durée de trois mois de plus dans le cadre d’une médiation judiciaire. En trois mois, par principe, le conflit entre les copropriétaires pourra être réglé. Il faut noter que c’est lorsque les conflits perdurent qu’ils s’enveniment jour après jour qu’ils usent les relations entre les parties. Or, la copropriété étant par nature collective, il est nécessaire d’instaurer un climat pacifique pour permettre à chaque propriétaire ou occupant de l’immeuble de jouir de son bien le plus sereinement possible.
Du côté des tribunaux aussi, nous soulignerons l’avantage non-négligeable de la médiation. Celle-ci permet de faire face à la problématique d’engorgement des tribunaux français qui est régulièrement mis en avant.
La loi avait instauré une obligation de tentative de conciliation, de médiation ou de procédure participative notamment pour les litiges dont le montant est inférieur à 5.000 euros ou pour les litiges relatifs à des troubles de voisinage, article 750-1 du Code de procédure civile. Dans le cadre d’une copropriété on peut se retrouver facilement dans ces deux situations : la première pourra correspondre à une procédure de recouvrement de charges de copropriété tandis que l’autre résultera de troubles résultant d’un occupant ou copropriétaire de l’immeuble, ne permettant pas aux voisins de jouir paisiblement de leur local.
Cet article a été annulé par un arrêt du Conseil d’état du 22 septembre 2022[1] dans sa rédaction issue de l’article 4 de la loi du 18 novembre 2016.
La réhabilitation de l’obligation de médiation
Compte tenu de l’engorgement des tribunaux et de la volonté législative de recourir à un mode amiable de résolution des litiges, un Décret n° 2023-357 du 11 mai 2023 réhabilite l’obligation. Le décret sera applicable aux instances introduites à compter du 1er octobre 2023.
La modification du texte concerne l’une des exceptions prévues par le texte : l’indisponibilité des conciliateurs entrainant l’organisation de la première réunion de conciliation dans un délai supérieur à trois mois à compter de la saisine d’un conciliateur. Dans sa version antérieure il était fait mention d’un « délai manifestement excessif au regard de la nature et des enjeux du litige ».
A qui profite la médiation ?
Choisir la médiation c’est avant tout rétablir un dialogue entre les parties et envisager une nouvelle relation plus saine par la conclusion d’un accord accepté par tous. La médiation profite aux parties qui comprendront qu’elles y ont intérêt. Contrairement au mécanisme traditionnel judiciaire ou les parties se revendiquent « avoir le droit », les parties à la médiation pourront se revendiquer « avoir intérêt » à y participer.
Une médiation réussie, c’est un accord conclu accepté par tous et une affaire réglée rapidement. Les copropriétaires ont pu retrouver une liberté de choix en ayant pris part au processus de médiation. Cela permettra aux futures relations entres copropriétaires de l’immeuble de s’apaiser naturellement.
Conseil pratique : Comment tirer profit de la médiation en matière de copropriété ?
A tout copropriétaire ou Syndicats des copropriétaires souhaitant contester l’appropriation de parties communes par un copropriétaire ou bien la vôtre ne faisant pas unanimité ; le recours à la médiation pourra vous aider à éviter un contentieux judiciaire long et couteux dont l’issue est soumise à l’aléa judiciaire. La médiation peut être initiée volontairement avant toute procédure judiciaire, ou directement devant le juge comme cela a été indiqué ci-dessus.
Comment la médiation s’organise-t-elle ?
Pour représenter au mieux les parties pendant la médiation, le Syndic, un représentant de la copropriété et le propriétaire adverse seront présents. Les parties peuvent avoir accès à des experts, et y ont souvent recours, qui accompagnera leur propos lors de la médiation.
Chaque partie pourra être accompagnée de son avocat qui aura pour rôle de sécuriser juridiquement l’accord qui pourrait être trouvé.
Le médiateur réunira des réunions plénières mais pourra également prévoir des entretiens individuels, le principe du contradictoire, essentiel dans le cadre d’une procédure judiciaire, ne s’appliquant pas dans le cadre d’une médiation.
Après être parvenu à une entente en médiation, un accord est rédigé et signé par le conseil des parties. Cet accord devra être validé en Assemblée Générale.
Quelles sont les limites de la médiation ?
Dans la mesure où l’efficacité de la médiation n’est plus à contester dans certains domaines, elle s’avère inadaptée dans certains cas particuliers. En effet, les litiges concernant les recouvrements de charges ou de loyers, lorsque des sommes dues ne sont pas payées, alors la médiation ne trouvera probablement pas sa place. On voit mal comment il pourrait être fait supporter à un copropriétaire qui ne paye déjà pas ses charges de copropriété les honoraires du médiateur. Toutefois, si par principe les honoraires du médiateur sont répartis à parts égales entre les parties en présence, une autre répartition peut être prévue si un accord intervient sur ce point.
Envisager une médiation dans les domaines précités serait au mieux la manifestation d’une volonté dilatoire de la part du débiteur. Il convient donc dans ces cas particuliers d’utiliser la voie traditionnelle, qui prévoit déjà la mise en place d’échéanciers pour pallier les difficultés des débiteurs.
Pour conclure, la médiation a su démontrer son efficacité sur certains sujets de la copropriété, selon Maître BOHBOT il serait donc nécessaire de cibler adéquatement les cas dans lesquels la médiation serait profitable. La médiation doit être évoquée au cas par cas en fonction des intérêts en présence et de la volonté de sortir du conflit.
Quant à Maître CHAVANCE, l’extrême confidentialité de la médiation, et ses nombreux avantages sont mis en exergue. La médiation permettra enfin à la copropriété de retrouver son sens et sa vocation, avec des discussions retrouvées entre copropriétaires et des relations finalement apaisées, affirmé par Maitre DEHGHANI-AZAR.
[1] CE, 22 sept. 2022 n° 436939 : https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/2022-09-22/436939