Les travaux sans autorisation en copropriété

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Travaux en copropriété

Souvent un copropriétaire souhaite entreprendre des travaux qu’il pense être de simples aménagements : démolition d’une cloison ou d’un mur, installation d’une climatisation ou d’une extraction….
Parfois il sollicite l’accord de l’assemblée générale considérant le risque d’atteinte à la solidité de l’immeuble ou l’impact sur les parties communes.
D’autres fois, il s’en passe.

Le régime d’autorisation a récemment évolué pour créer des régimes distincts, façon mille-feuille, à la fois pour les travaux d’accessibilité puis pour les travaux d’isolation thermique de la toiture ou du plancher. (Ordonnance du 30 octobre 2019, loi dite « habitat dégradé » du 9 avril 2024.)

Le règlement de copropriété stipule parfois qu’il suffit d’obtenir l’accord du syndic ou de l’architecte de l’immeuble. Ces clauses sont-elles valables ?

Le concept des travaux sans autorisation suggère l’existence de son corollaire, à savoir les travaux supposant une autorisation, desquels ils doivent donc être distingués (I).

Le concept de travaux sans autorisation peut encore renvoyer à l’idée de travaux effectués de façon irrégulière, dont la mise en oeuvre « sauvage » appellerait celle de mesures de remise en état du site ayant fait l’objet des travaux irréguliers, effectués sans autorisation, ou éventuellement de mesures de régularisation effectuées a posteriori (II).

Cette double suggestion du concept des travaux sans autorisation amène à l’analyse de chacune de ces deux acceptions.

I. Distinction des travaux sans autorisation de ceux nécessitant une autorisation

Le critère de distinction des travaux sans autorisation d’avec ceux nécessitant une autorisation préalable est établi par l’ampleur et la nature des travaux en cause.

A. La liberté de réaliser des travaux sans autorisation

S’il est question de travaux mis en œuvre dans un lot privatif de copropriété, alors, par principe, le copropriétaire qui les fait exécuter n’a pas besoin de solliciter aucune autorisation que ce soit.

D’une façon générale, en effet, le copropriétaire peut se comporter en maître souverain à l’intérieur de son propre lot de copropriété dont il détient la propriété pleine et entière.

L’article 9 de la loi du 10 juillet 1965 sur le droit de la copropriété des immeubles bâtis, qui fait écho aux dispositions plus générales de l’article 544 du Code Civil sur la définition du droit de propriété, dispose clairement sur ce point :

« Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble ».

C’est donc à ce titre qu’un copropriétaire peut par principe mettre en œuvre tout type de travaux qu’il vient à juger opportun à partir du moment où ces travaux se bornent à demeurer circonscrits dans le strict périmètre de l’étendue de son lot privatif.

Ainsi, à titre illustratif, il a pu être jugé que les copropriétaires peuvent :

  • en principe faire tous travaux dans leurs lots sans autorisation particulière (TGI PARIS, 13 mars 1975 : D. 1976, inf rap. p. 70) :
  • ils peuvent ainsi procéder à un réaménagement intérieur de leur lot (CA PARIS, 3 mars 1988 : D. 1988, inf rap. p.99)
  • installer une cuisine au lieu et place d’une salle à manger (CA PARIS, 1ère chambre Urg., 24 mars 1988 : Juris-Data n°1988-021802),
  • percer un plancher pour relier deux lots situés à des niveaux différents si ce plancher est privatif (CA PARIS, 3ème chambre, 8 juillet 1986 : Juris-Data, n°1986-023893),
  • pratiquer une ouverture dans une cloison privative non porteuse (CA PARIS, 27 mai 1981 : D. 1982, inf rap. p. 143),
  • modifier la distribution intérieure de leur lot en créant ou en supprimant des cloisons séparatives (CA PARIS, 6ème chambre. B, 27 mai 1981 : D. 1982, inf. Rap. p. 143, n°46).

Cette liberté d’action reconnue à cet égard aux copropriétaires en ce qui concerne leur lot privatif constitue un principe d’ordre public, de telle sorte que toute éventuelle clause du règlement de copropriété qui viendrait restreindre d’une quelconque façon son exercice serait immanquablement réputée non écrite.

Néanmoins, comme toute liberté, celle-ci souffre d’exceptions, lesquelles sont d’ailleurs prévues par les dispositions de l’article 9 précité de la loi du 10 juillet 1965.

Tout d’abord, les travaux en question ne doivent pas être contraires à la destination de l’immeuble (dont la notion peut être plus ou moins précisée dans le règlement de copropriété applicable, lequel peut prévoir par exemple l’interdiction de modifier tout ce qui affecte l’harmonie de l’immeuble – CA PARIS, 14ème chambre B, 1er septembre 2005 : AJDI 2005, p. 844 – – ou en interdisant d’édifier sur les terrasses ou loggias des superstructures, même en matériaux légers – Civ 3ème, 7 octobre 1992 : Rev. loyers 1992, p. 462 ; RD imm. 1993, p. 121, obs. P. Capoulade)

Ensuite, les travaux ne doivent pas altérer les droits des autres copropriétaires de l’immeuble. Ils ne sauraient par exemple entraîner une altération de leur partie privative ou occasionner un trouble anormal de voisinage. Par exemple, si les travaux envisagés devaient entraîner une perte de vue ou d’ensoleillement pour des lots de copropriété voisin, ils seraient alors immanquablement constitutifs de travaux irréguliers, de travaux effectués sans autorisation (CA PARIS, 23ème chambre. A. 20 novembre 1996 : Loyers et copr. mars 1997, n°91). De même s’agissant de travaux qui entraîneraient des désordres graves dans un lot voisin (CA LIMOGES, 25 octobre 2012 : JurisData n°2012 – 027613 ; Loyers et copr. 2013, comm. 100, obs. G.V.).

C’est donc dire que lorsque le copropriétaire fait réaliser, même s’il se borne à intervenir dans le strict périmètre de son lot privatif de copropriété, des travaux qui sont contraires à la destination de l’immeuble ou qui remettent en cause les droits des autres copropriétaires de l’immeuble, alors, les travaux en question deviennent des travaux irréguliers, car interdits par la Loi, ils deviennent des travaux effectués sans autorisation.

Enfin, il doit être précisé que si les travaux envisagés à l’intérieur d’un lot privatif de copropriété supposent une altération des parties communes de l’immeuble, à quelque titre que ce soit, alors il ne saurait plus s’agir là de travaux pouvant être effectués sans autorisation, mais au contraire, il s’agirait de travaux supposant une autorisation préalable.

B. L’autorisation nécessaire

S’il est question de travaux dont la réalisation suppose une altération des parties communes de l’immeuble, le copropriétaire qui souhaite les faire exécuter est tenu de solliciter l’autorisation préalable de leur mise en œuvre.

Cette autorisation doit être sollicitée auprès de l’assemblée générale des copropriétaires, laquelle devra procéder par un vote à la majorité absolue de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, pour les travaux qui y sont prévus.

Il s’agit notamment des travaux visés au b) de l’article 25, à savoir les « travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, et conformes à la destination de celui-ci ».

La jurisprudence a eu l’occasion de préciser que les « travaux affectant les parties communes » de l’immeuble devaient s’entendre de travaux effectués dans les parties privatives mais qui comportent des incidences sur les parties communes, qu’elles affectent dans leur consistance matérielle ou les modalités de leur usage, sans toutefois s’analyser en une véritable appropriation (Civ 3ème, 20 mai 1998, n°96-20.889 : RD imm. 1998, p. 419, note P. Capoulade).

Sont concernés, pour ces travaux affectant les parties communes :

  • des travaux impliquant le passage de conduits ou canalisations sur ou à travers des parties communes (Civ 3ème, 27 novembre 1990, n°89-12.925 : Juris-Data n°1990-003795),
  • des travaux de percements ou d’agrandissement de fenêtres ou d’ouvertures dans les murs, à partir du moment bien sûr où ces murs ont un caractère commun, peu important à cet égard qu’ils se situent à l’intérieur de parties privatives (CA VERSAILLES, 29 octobre 2012 : Juris-Data n°2012-024512 ; Loyers et copr. 2013, comm. 30, obs. G. VIgneron) ;
  • des travaux concernant l’aménagement des combles ou de greniers et affectant la toiture partie commune (CA PARIS, 6 décembre 1975 : JCP 1976, II, 18447 ; Civ 3ème, 15 janvier 2003, n°01-10.337 : Juris-Data n°2003-017543 ; Dossiers CSAB mai 2003, n°7, obs. A. Dunes),
  • les travaux de percement d’un mur commun pour créer un nouvel accès aux parties communes ou faire communiquer deux appartements (Civ 3ème, 20 février 1969 : Inf. rap. copr. 1969, p. 124 ; Civ 3ème, 7 décembre 1971, n°70-12.818 : Bull. civ. III, n°602 ; JCP 1972, II, 17001),
  • le percement d’une dalle partie commune, même pour procéder à un simple sondage (Civ 3ème, 22 mai 1997, n°95-16.438 : JurisData n°1997-002178 : Bull. civ. III, n°110 ; JCP N 1997, II, p. 1358), les travaux d’installation d’un interphone (CA PARIS, 23ème chambre A, 4 mars 1998 : Loyers et copr. 1998, comm. 288),
  • l’apposition de plaques, enseignes ou panneaux sur les parties communes (Civ 3ème, 30 mai 1972 : JCP 1972, II, 17174, note E.J. Guillot),
  • la création d’une mezzanine, dès lors que son ossature s’appuie sur une structure maçonnée et est en partie suspendue à deux fermes de la charpente (CA PARIS, pôle 4, 2ème chambre, 25 octobre 2017, n°15/18259 : Administrer février 2018, p.39, note J.-R. Bouyeure).

S’agissant des travaux affectant l’aspect extérieur de l’immeuble, on peut penser par exemple :

  • à des travaux de pose d’enseignes ou de panneaux publicitaires (Civ 3ème, 24 octobre 1990, n°88-17.514 : Juris-Data n°1990-002674 ; Bull. civ. III, n°199 ; RD imm. 1991, p. 94, obs. F. Givord et C. Giverdon),
  • les travaux de fermeture d’une loggia (Civ 3ème, 7 novembre 1978, n°77-11.421 : Bull. civ. III, n°333 ; Gaz. Pal. 1979, 1, somm. p. 20 et Rép. min. 7 sept. 1987 : JOAN, 19 octobre 1987, p. 5814), la réouverture d’une fenêtre obstruée (Civ 3ème, 12 mai 1993, n°91-11.889 : JurisData n°1993-001701),
  • les travaux relatifs aux devantures ou vitrines de magasins (Civ 3ème, 30 mai 1972, n°71-10.724 : Bull. civ. III, n°350 ; AJPI 1973, p. 804),
  • l’installation de grilles d’aération modifiant des soupiraux (CA PARIS, 23ème chambre. B, 24 octobre 2002 : Loyers et copr. 2003, comm. 80),
  • le remplacement des fenêtres d’une loggia, séparées par un bardage métallique rouge, par une baie vitrée coulissante (CA POITIERS, 27 février 2008 : Loyers et copr. 2009, comm. 48, obs. G. Vigneron).

A noter que, la loi Habitat dégradé, pour aider un copropriétaire risquant d’avoir un DPE individuel mal noté, prévoit que les travaux d’isolation peuvent être entrepris à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965.

Ainsi, l’idée principale à retenir sur ce point est que, dès lors qu’un copropriétaire souhaitera mettre en œuvre des travaux entrant dans les prévisions des dispositions de l’article 25 b), il sera par principe tenu de solliciter une autorisation préalable de l’assemblée générale des copropriétaires qui devra statuer sur le projet de travaux concerné en procédant par un vote à la majorité absolue.

Ce principe d’autorisation préalable pour les travaux concernés ne saurait être mis en échec par l’existence éventuelle d’une clause du règlement de copropriété qui prévoirait la possibilité pour le propriétaire de tel lot, de pouvoir faire effectuer tel type de travaux déterminés qui s’assimileraient à ceux prévus par les dispositions de l’article 25 de la loi n°65-557 (voire éventuellement celles de l’article 26) sans avoir à requérir l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires : la jurisprudence, en effet, répute ce type de clause systématiquement non écrite, ainsi que l’a jugé la Cour de Cassation dans un arrêt de principe rendu le 12 mars 1997 (Civ 3ème, n°95-15.953).

Il en résulte que si un copropriétaire devait s’aviser de mettre en œuvre un projet de travaux qui entre effectivement dans les prévisions des dispositions légales applicables qui conditionnent leur réalisation à l’obtention d’une autorisation votée par l’assemblée générale des copropriétaires sans respecter les formalités prévues par ces dispositions légales, alors les travaux ainsi mis en œuvre seront considérés comme étant des travaux « sauvages », soit des travaux effectués sans autorisation.

En plus de caractériser une infraction aux dispositions de la loi n°65-557, une telle situation emporterait une atteinte flagrante aux droits du syndicat des copropriétaires, dont l’objet légal prévu par les dispositions de l’article 14 de cette même loi, consiste en la conservation, l’administration et même l’amélioration des parties communes.

Depuis l’ordonnance du 30 octobre 2019 un nouveau régime d’autorisation un peu particulier a été crée pour les travaux d’accessibilité handicapé.

L’article 25-2 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit qu’il suffit pour le copropriétaire de notifier une résolution d’information indiquant les travaux prévus.

L’assemblée générale ne pouvant refuser l’autorisation qu’à certaines conditions via une résolution motivée.

A noter que, la loi Habitat dégradé, pour aider un copropriétaire risquant d’avoir un DPE individuel mal noté, prévoit un nouveau régime pour les travaux d’isolation peuvent être entrepris à la majorité de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965.

L’article 25-2-1 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que ces travaux se votent à la majorité absolue. Toutefois, le régime d’autorisation judiciaire prévu à l’article 30 de cette même loi ne paraît pas applicable.

Il existe un danger à superposer les régimes du fait du manque de lisibilité du régime applicable.

Toutefois, il serait possible de régulariser une situation créée de façon illégale, c’est-à-dire sans autorisation préalable obligatoire.

II. Quel est le sort des travaux sans autorisation, effectués de façon irrégulière ?

Si des travaux soumis à autorisation préalable obligatoire à leur mise en œuvre ont été réalisés sans que n’ait été obtenue une telle autorisation, le syndicat des copropriétaires serait alors en droit de solliciter judiciairement et sous astreinte une remise en état des lieux dans leur état initial aux frais du copropriétaire contrevenant (A).

Mais, il lui serait également possible, de par une décision de son organe délibérant constitué par l’assemblée générale de ses membres, de formaliser a posteriori une autorisation des travaux irrégulièrement mis en œuvre parce que sans l’autorisation préalable qui était pourtant juridiquement obligatoire pour le type de travaux concerné (B).

A. Position de fermeté consistant à demander la suppression des travaux irréguliers effectués sans autorisation

Cette remise en état des lieux dans son état initial suppose toujours d’obtenir préalablement une décision de justice : en aucun cas, le syndicat des copropriétaires ne pourrait se faire justice à lui-même en faisant procéder de sa propre initiative à des travaux visant à la suppression de travaux irrégulièrement effectués : il s’agirait alors de travaux effectués sans l’autorisation judiciaire préalable qui, même dans un tel cas de figure, demeure toujours nécessaire (Civ 3ème, 25 mars 2021, n°20-14.570 : JurisData n°2021-004325 ; Loyers et copr. 2021, comm. 103, obs. A. Lebatteux ; Administrer juill. 2021, p. 44, obs. J-R. Bouyeure ; AJDI 2021, p.529).

L’action juridictionnelle du syndicat des copropriétaires visant à une remise en état des parties communes altérées par la mise en oeuvre de travaux irréguliers dans leur état initial peut être diligentée sans qu’il n’y ait à établir la preuve d’un préjudice particulier (Civ 3ème, 25 janvier 1995, n°92-19.600 : JurisData n°1995-000107 ; Bull. civ. III, n°29 ; RJDA mai 1995, n°632 ; RD imm. 1995, p. 383, obs. P. Capoulade).

Une telle action juridictionnelle concerne également le cas du copropriétaire ayant obtenu une autorisation de travaux, mais qui n’en respecte pas les termes (Civ 3ème, 7 janvier 2021, n°16-26.998 : JurisData n°2021-002323 ; Loyers et copr. 2021, comm. 48, note C. Coutant-Lapalus).

Elle est soumise à la prescription extinctive de droit commun de cinq ans en ce qu’il s’agit d’une action personnelle. Mais si les travaux effectués sans autorisation aboutissent à une situation d’annexion de fait des parties communes, alors l’action du syndicat des copropriétaires visant à la remise en état dans leur état initial des parties communes ainsi annexées sera qualifiée d’action réelle, soumise de ce fait à une prescription trentenaire (Civ 3ème, 20 avril 2023, n°21-16.733 : JurisData n°2023-006416 ; Loyers et copr. 2023, comm. 104, obs. C. Coutant-Lapalus ; Civ 3ème, 7 septembre 2022, n°21-13.014 : JurisData n°2022-015250 ; Loyers et copr. 2022, comm. 187, obs. C. Coutant-Lapalus ; Administrer octobre 2022, p. 44, obs P. Déchelette-Tolot ; Ann. loyers 2022, p. 86, obs. J.-M. Roux).

Prescription quinquennale ou trentenaire, le point de départ de ce délai est fixé au jour de la commission de l’infraction, soit le jour de la réalisation des travaux, c’est-à-dire en fait le jour du début des travaux (Civ 3ème, 9 juillet 2020, n°19-17.843 : JurisData n°2020-016387 ; Loyers et copr. 2020, comm. 115, obs. A. Lebatteux ; Administrer oct 2020, p. 38, obs. J.-R. Bouyeure).

Sous réserve d’une bonne administration de la preuve devant le juge qui est saisi d’une telle réclamation, la remise en état des lieux dans leur état d’origine, c’est-à-dire avant la mise en œuvre des travaux effectués sans autorisation dont il est demandé la suppression, doit être en principe ordonnée par le juge, lequel ne pourrait refuser de faire droit à la demande du syndicat des copropriétaires en acceptant par exemple une solution permettant de conserver les travaux irrégulièrement réalisés moyennant des aménagements pour en limiter les inconvénients pour la copropriété (CA PARIS, 23ème chambre. A, 19 novembre 1997 : Loyers et copr. 1998, comm. 136).

Le juge n’a pas à tenir compte non plus par principe de considérations économiques, relatives au coût de la remise en état, ces considérations n’étant pas pertinentes au regard du caractère illicite de travaux effectués sans autorisation et de la sanction qui en découle, à savoir la réalisation de travaux de remise en état des lieux altérés de façon irrégulière aux frais du maître d’ouvrage (CA PARIS, pôle 4, 2ème chambre, 26 octobre 2022, n°17/08201 : JurisData n°2022-018687).

Il importe peu également que les travaux incriminés n’aient pas porté atteinte à la solidité de l’immeuble (CA GRENOBLE, 2ème chambre civile, 24 octobre 2017, n°17/00805 : JurisData n°2017-020926), qu’ils aient pu être effectués sur la délivrance d’un permis de construire (CA PARIS, 23ème chambre. B, 27 avril 1990 : Loyers et copr. 1990, comm. 327), ou qu’ils aient été mis en oeuvre en conformité des normes de construction en vigueur (CA PARIS, pôle 4, 2ème chambre, 11 janvier 2023, n°19/17100 : JurisData n°2023-001023), ou même que les travaux aient été réalisés par un propriétaire ayant depuis cédé son lot de copropriété auquel bénéficient les travaux irréguliers effectués sans autorisation : dans ce cas l’action juridictionnelle devra être dirigée contre le propriétaire actuel du lot concerné, même si en fait ce n’est pas lui qui aura fait exécuter les travaux litigieux (Civ 3ème, 14 avril 2016, n°15-12.905).

A noter qu’un copropriétaire, ou plusieurs copropriétaires s’ils le décident, seraient également recevables à saisir le juge d’une demande de remise en état dans leur état initial de parties communes altérées par la mise en oeuvre de travaux effectués sans autorisation par un autre copropriétaire indélicat (Civ 3ème, 21 avril 2022, n°21-15.820 : JurisData n°2022-006476 ; loyers et copr. 2022, comm. 103, obs. A. Lebatteux). A ce titre, ils ne seraient pas astreints à la démonstration de l’existence d’un préjudice qui leur serait personnel (Civ 3ème, 26 janvier 2017, n°15-24.030 : JurisData n°2017-001112 ; Loyers et copr. 2017, comm. 87, obs. A. Lebatteux), mais ils seraient toutefois tenus d’attraire dans la cause le syndicat des copropriétaires (Civ 3ème, 8 juillet 2015, n°14-16.975 : JurisData n°2015-016475 ; Loyers et copr. 2015, comm. 208, obs. G. Vigneron).

Précisons enfin qu’en droit, la mise en oeuvre de travaux effectués sans autorisation sur les parties communes d’une copropriété sont constitutifs d’un trouble manifestement illicite au sens des dispositions de l’article 835 du Code de Procédure Civile, indépendamment même de l’ampleur des aménagements effectués ou de l’étendue des désagréments qu’ils causent (Civ 3ème, 9 mars 2022, n°21-15.797 : JurisData n°2022-003655 ; Loyers et copr. 2022, comm. 69, obs. A. Lebatteux ; Administrer avril 2022, p. 51, obs. P. Déchelette-Tolot). C’est donc dire que la décision juridictionnelle ordonnant la remise en état des lieux dans leur état initial peut fort bien prendre la forme d’une simple ordonnance de référé qui peut être obtenue dans des délais rapides (Civ 3ème, 21 avril 2022, n°21-15.820 : JurisData n°2022-006476 ; Loyers et copr. 2022, comm. 103, obs. A. Lebatteux ; Administrer juin 2022, p. 35, obs. P. Déchelette-Tolot ; Civ 3ème, 27 février 2001, n°99-17.748 : JurisData n°1991-003704 ; Rev. loyers 2001, p. 240, obs. J.-M. Gélinet).

B. Position plus souple consistant à donner une autorisation a posteriori des travaux irréguliers effectués sans autorisation

Plutôt que d’exiger par voie de justice une remise en état des parties communes altérées par des travaux effectués sans autorisation dans leur état initial, le Syndicat des Copropriétaires, de par une décision de son organe délibérant que constitue l’Assemblée Générale de ses membres, peut décider d’accorder une autorisation a posteriori pour des travaux irréguliers qui ont déjà été mis en œuvre et pour lesquels aurait du avoir été sollicitée et obtenue préalablement à leur réalisation, une autorisation dans les conditions qui ont été exposées dans la première partie de cet article.

L’autorisation ainsi accordée par l’assemblée générale des copropriétaires peut être explicite ou implicite (Civ 3ème, 9 juin 2010, n°09-15.013 : JurisData n°2010-009607 ; Administrer octobre 2010, p. 61, obs. J.R. Bouyeure ; Civ 3ème, 29 mai 1973, n°72-11.447 : Bull. Civ; III, n°373 ; Inf. rap. copr. 1974, p. 15, note J. Cabanac ; JCP G 1973, IV, 113) : Ainsi, la décision de ne pas démolir une construction irrégulière équivaut à une autorisation a posteriori (Civ 3ème, 19 novembre 1997, n°96-10.771 : JurisData n°1997-004761 ; Loyers et copr. 1998, comm 56).

La décision de l’assemblée générale des copropriétaires qui tendrait ainsi à ne pas faire valoir ses droits, doit bien sûr être régulièrement votée (CA PARIS, 23ème chambre A, 21 février 1995 : Rev. loyers 1995, p. 232), ce qui implique que l’assemblée doit avoir en mains tous les éléments lui permettant de se prononcer en connaissance de cause (nature des travaux ; modalités d’exécution, et impact sur l’immeuble, etc – CA LYON, 18 novembre 2008 : Loyers et copr. 2009, comm. 132, obs. G. Vigneron) et doit être rédigée de façon très claire, sans aucune ambiguité sur la question (Civ 3ème, 9 juin 2010, n°09-15.013 : JurisData n°2010-009607 ; Administrer octobre 2010, p. 61, obs. J.-R. Bouyeure).

Pareille décision doit être votée à la majorité qui aurait été nécessaire à l’origine pour autoriser les travaux en cause (Civ 3ème, 20 mars 2002, n°00-17.751 : JurisData n°2002-013613 ; JCP G 2002, IV, 1780). Ainsi, devra être annulée la décision qui ratifie à la majorité de l’article 24 selon les modalités prévues par l’article 25-1 de la loi, des travaux qui ne pouvaient être pour partie autorisés qu’à la majorité de l’article 26 (Civ 3ème, 30 octobre 2012, n°11-21.172 : JurisData n°2012-024471 ; Loyers et copr. 2013, comm. 25, note G. Vigneron).

En tout état de cause, la possibilité de régularisation a posteriori de travaux qui auraient été mis en oeuvre de façon irrégulière, sans avoir obtenus préalablement l’autorisation obligatoire à leur mise en œuvre, ne sera pas possible si les travaux en cause ne sont pas conformes à la destination de l’immeuble (Civ 3ème, 22 octobre 2020, n°19-21.961 : JurisData n°2020-016986). Le cas échéant, un examen minutieux du règlement de copropriété applicable devra être effectué afin de cerner au mieux, concrètement, la destination de l’immeuble, ce qui permettra alors de déterminer la possibilité effective d’une régularisation a posteriori par l’assemblée générale des copropriétaires de travaux irrégulièrement mis en oeuvre, car effectués sans l’autorisation préalable juridiquement toujours requise par principe.

Source : Code de la copropriété 2024, Lexisnexis.

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