Recouvrement des charges de copropriété : les pièces nécessaires

  Rédigé par :

Les charges de copropriété sont la ressource nécessaire au bon fonctionnement d’une copropriété.

Les manquements d’un copropriétaire dans le paiement de ses charges peuvent compliquer la gestion d’un immeuble ou encore le mettre en péril quand la réalisation de travaux d’entretien est constamment repoussée faute de trésorerie.

Le recouvrement des charges de copropriété impayées fait donc partie des missions essentielles du syndic de copropriété, sa responsabilité pouvant être engagée en cas de négligence s’il n’agit pas dans le délai de prescription de 5 ans (contre 10 ans auparavant).

La mise en demeure, « fût-elle envoyée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception » ne permet pas d’interrompre le délai de prescription[1].

En droit ce qui compte ce n’est pas celui qui a raison, mais celui qui le prouve.

Pour ce faire, le syndicat des copropriétaires, représenté par son syndic, doit réunir un certain nombre d’élément dont la liste n’est pas légalement fixée.

La jurisprudence est venue remplir ce vide en indiquant les pièces nécessaires à la bonne marche de cette procédure.

Le cabinet BJA vous propose donc un focus sur les pièces nécessaires au recouvrement de charges de copropriété.

Ces documents répondent au besoin de justifier de la qualité de propriétaire du débiteur, de l’existence de la créance ainsi que la qualité à agir du syndic.

Quelles sont les pièces nécessaires à la justification de la qualité de propriétaire ?

La justification de la qualité de propriétaire du débiteur est indispensable pour diligenter une procédure de recouvrement de charges de copropriété.

Sans cette justification, le tribunal ne pourra condamner le défendeur au paiement des charges impayées et viendra donc débouter le syndicat des copropriétaires.

Afin de répondre aux atteintes du Tribunal, il convient de verser la matrice cadastrale, la fiche d’immeuble ou encore le titre de propriété.

Ces éléments s’obtiennent auprès des services des impôts fonciers compétents en fonction de la localisation de l’immeuble.

Ces éléments doivent impérativement mentionner les lots appartenant au copropriétaire défaillant.

Le tribunal pourra ainsi vérifier que les charges réclamées correspondent bien aux tantièmes attachés aux lots mentionnés sur le justificatif de propriété.

Comment le syndic de copropriété peut-il justifier de sa qualité à agir ?

Le recouvrement des charges de copropriété fait partie des missions essentiels d’un syndic de copropriété.

Une procédure de recouvrement de charges de copropriété peut donc être initié sans autorisation préalable de l’assemblée générale selon les dispositions de l’article 55 du décret du 17 mars 1967.

Seulement, le tribunal réclamera un contrat de syndic afin de démontrer que le syndic est bien le représentant légal du syndicat des copropriété et qu’il a donc qualité à agir pour mener cette procédure de recouvrement de charges de copropriété[2].

Si la mission du syndic a pris fin ou si son mandat est nul, le tribunal sera contraint de déclarer l’irrecevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires.[3]

Quels sont les éléments nécessaires à la justification de la créance du syndicat des copropriétaires ?

Un relevé de compte

En premier lieu, il est indispensable de verser aux débats un relevé de compte détaillant la dette du copropriétaire.

Un certain formalisme est exigé par les tribunaux.

Ainsi, ce relevé de compte doit indiquer la date et le libellé des charges appelées ainsi que leur montant. Il est également demandé de distinguer les charges des frais de recouvrement.

Le syndicat des copropriétaires est tenu de prouver que les charges réclamées sont exigibles, la présence d’un report à nouveau sur ce relevé de compte est donc défendue.[4] En effet, l’intégration dans le décompte, d’un report du solde débiteur ou du solde antérieur de l’ancien syndic, ne permet pas justifier des charges réclamées.

Si le relevé de compte venait à intégrer un report à nouveau, il est certain que le tribunal déboutera le syndicat des copropriétaires de la somme correspondante.

Ce report à nouveau ou reprise se caractérise par l’intégration dans le décompte, d’un report du solde débiteur. En conséquence, le syndic doit justifier des provisions dues par le copropriétaire depuis l’origine de la dette ;

Toutefois, sur le fondement de l’article 1342-10 du Code civil, il est jugé de manière constante que les versements volontaires s’imputent sur les chargées impayées les plus anciennes, sauf contre-indication du débiteur lors du règlement[5].

Les appels de fonds

Il appartient au syndicat des copropriétaires de fournir l’intégralité des appels de fonds émis depuis l’origine de la dette.

Ces appels de fonds devront justifier chacune des entrées présentes au débit du relevé de compte.

L’appel de fonds est l’élément permettant de connaître le montant de la participation de chaque copropriétaire aux dépenses courantes de la copropriété.

Ces appels de fonds doivent permettre de vérifier si les sommes appelés correspondent aux dépenses de la copropriété votées en assemblée générale et ne peuvent donc seulement faire mention de la somme réclamée au copropriétaire.

A défaut, le syndicat des copropriétaires sera débouté du montant réclamé sur l’appel de fonds[6]

La Cour de cassation est venue limiter leur l’importance dans son arrêt du 08 mars 2018[7] en indiquant que l’exigibilité d’une créance en matière de recouvrement de charge de copropriété ne dépend pas de la communication de l’appel de fonds qui n’est qu’un rappel des décisions prises en assemblées générales.

La créance à l’encontre du copropriétaire est justifiée même si ce dernier n’a pas reçu d’appels de fonds et de convocations d’assemblée générale pendant 5 ans en raison de la carence du syndic qui n’a pas tenu compte de la mutation qui lui avait pourtant été régulièrement notifiée. (CA, Paris, Pôle 4, chambre 2, 13 octobre 2021 – n° 17/19152 – Administrer déc. 2021, p. 46. Obs. J.R Bouyeure)

Ces jurisprudences sont rarement suivies par les tribunaux de premier ressort et nous recommandons vivement de fournir les appels de fonds correspondant à la créance.

Les procès-verbaux d’assemblées générales

La production des procès-verbaux des assemblées générales est indispensable pour mener à bien une procédure de recouvrement de charges de copropriété.

Il convient de produire les procès-verbaux des assemblées générales ayant votés les budgets prévisionnels et approuvé les comptes des exercices pour lesquels les charges n’ont pas été réglées.

Ainsi, la créance du syndicat des copropriétaires n’est pas justifiée dès lors que les comptes concernant l’objet du litige n’ont pas été approuvés[8].

L’arrêt de la Cour de cassation du 08 mars 2018, précédemment évoqué, ajoute que la production des convocations aux assemblées générales n’est pas nécessaire. La Cour d’appel de Paris abondait déjà en ce sens en indiquant que la démonstration de la régularité de la convocation aux assemblées générales n’est pas une condition de la recevabilité de l’action en recouvrement des charges.[9]

En revanche, les certificats attestant que les assemblées générales n’ont fait l’objet d’aucun recours s’ajoutent aux pièces nécessaires à cette procédure. Ces attestions bien que facultatives permettent d’écarter toute forme de contestation dilatoire sur une prétendue irrégularité des assemblées générales.

L’article 42 de la loi du 10 juillet 1965 impose un délai de forclusion de deux mois à l’issue duquel l’assemblée générale ne pourra être contestée.

Ce délai court à compter de la réception par le copropriétaire du procès-verbal de l’assemblée générale.

Ce délai écoulé, le syndic pourra éditer cette attestation de non-recours.

La justification des frais et des démarches amiables

Les frais engagés par le syndicat des copropriétaires au titre de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 font généralement l’objet d’un débouté par le tribunal.

Ces sommes doivent donc être mises à la charge de la copropriété.

Il convient tout de même de produire l’ensemble des justificatifs correspondant à ces diligences.

Ces éléments permettent, à défaut d’en obtenir le remboursement, de démontrer que le syndicat des copropriétaires a engagé des démarches amiables afin d’obtenir le paiement de sa créance.

Ainsi, il convient de produire une copie des courriers de relance, de mises en demeure ou encore de protocole d’accord soumis au copropriétaire.

Le tribunal considérera que le copropriétaire n’a pas saisi l’opportunité d’éviter une procédure contentieuse.

Quels peuvent-être les autres éléments pouvant être nécessaires à la procédure de recouvrement de charges ?

Le règlement de copropriété

Dans certains cas de figure, il peut être nécessaire de fournir au tribunal le règlement de copropriété.

Lorsque le bien faisant l’objet d’un impayé de charges de copropriété appartient à une indivision, il est essentiel de fournir le règlement de copropriété quand celui-ci fait mention d’une clause de solidarité.

A défaut, le syndicat des copropriétaires ne pourra obtenir la condamnation solidaire des défendeurs et le tribunal devra prononcer une condamnation conjointe de ces derniers.

Si un des membres de l’indivision se révèlerait insolvable, le syndicat des copropriétaires courra le risque de ne pas recouvrir une partie de sa créance.

Le règlement de copropriété ainsi que ses modificatifs peuvent également être nécessaires dans l’hypothèse d’une modification de l’état descriptif de division si la numérotation des lots venait à avoir été modifiée par exemple.

Les décisions de justice préalablement rendues

Le cas des copropriétaires « récidivistes » est fréquent.

Le syndicat des copropriétaires devra donc verser aux débats les décisions de justice ayant déjà été rendues à l’encontre du copropriétaire défaillant.

La première raison est d’ordre juridique puisque le syndicat des copropriétaires ne peut réclamer des sommes ayant déjà fait l’objet d’une décision de justice.

Le tribunal s’attachera à vérifier que ce principe de l’autorité de la chose jugée est bien appliqué dans les demandes du syndicat des copropriétaires.

La seconde raison est plus pragmatique puisque le tribunal sera plus enclin à accorder des demandes accessoires au syndicat des copropriétaires lorsqu’il s’agit d’un copropriétaire ayant déjà fait l’objet d’une ou plusieurs condamnations.

A titre d’exemple, la Cour d’appel retient des dommages et intérêt et elle indique dans sa motivation « les manquements systématiques et répétées de Madame (…) cause un préjudice financier, direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires. »[10]

[1] Cass .com., 18 mai 2022, n°202-23.204,B
[2] Cass. 3e civ., 9 sept. 2014, n°13-18.880
[3] Cass. 3ème civ., 8 mars 2000, n°97-17.517, Cass. 3ème civ., 9 septembre 2014, n°13-18.880
[4] Cass. 3ème civ., 14 juin 2018, n°17-14.766 ; dans le même sens Cass. 3ème civ., 3 décembre 2020 – n°19-20.666 : JurisData n°2020-020017
[5] Cass. com., 9 oct. 2019, n° 18-15.793
[6] CA Paris, 1ère ch, 9 sept 2004
[7] Cass, 3ème civ., 8 mars 2018, n°17-15.959
[8] Cass. 3ème civ., 12 juin 1991
[9] Cass, 3ème civ., 8 mars 2018, n°17-15.959, CA Paris, 16 mai 2002
[10] CA Paris, P.4, Ch. 2, 13 septembre 2023, RG : 19/13927, Administrer n°580 Novembre 2023, Pascaline Déchelette-Tolot

Recommandations du cabinet BJA :

Le cabinet BJA dispose d’une expertise reconnue en matière de recouvrement de charges et se tient à la disposition des syndics de copropriété afin de les accompagner dans leurs procédures de recouvrement de charges de copropriété afin de constituer correctement le dossier et faire face aux hypothèses particulières concernant le copropriétaire débiteur (décès, surendettement, liquidation judiciaire…).

  Rédigé par :

Partager sur